Les ressources ligneuses en pâturage
Les ligneux sont utiles au pâturage, à l’élevage et à l’équilibre écologique des territoires.
Longtemps victimes des politiques agricoles et paysagères qui ont "lutté" contre la déprise et ont "amélioré" les terres, les ligneux retrouvent une seconde jeunesse auprès des éleveurs et leurs troupeaux. D’ailleurs, de plus en plus de références scientifiques et techniques prouvent dorénavant leur intérêt fourrager et environnemental.
Le terme "ligneux" au sens pastoral englobe les arbres, arbustes, broussailles, etc, c’est-à-dire des ligneux plus ou moins hauts. Ils forment ainsi une ou des strates pastorales complémentaires à la strate herbacée que les pratiques d’élevage peuvent valoriser.
Les ligneux au pâturage ont différentes fonctions. Ils peuvent servir d’ombrage, de brise vent,…, mais aussi de ressource fourragère pour les troupeaux.
Aujourd’hui, il ne s’agit plus de lutter contre les ligneux mais de profiter de la ressource alimentaire qu’ils offrent. Les ligneux permettent notamment de renforcer l’autonomie alimentaire des fermes et de sécuriser le système d’élevage face aux aléas climatiques. Ils trouvent une place dans toutes les productions animales.
Même si la nature des espèces ligneuses varie selon le contexte pédoclimatique, les principes et leviers techniques pour appréhender leur utilisation dans les fermes sont communs. Ils ne sont d'ailleurs pas si éloignés de ceux réservés à l'herbe.
Les effets de la présence des ligneux sur la disponibilité alimentaire de la végétation
Les usages des ligneux dans les fermes sont variés : pâturage mais aussi coupe pour une distribution en vert ou en sec. Les ligneux diversifient la disponibilité alimentaire d'un milieu au cours de l'année par :
Des effets directs
Les ligneux produisent du fourrage (tout ou partie de la plante). Ils peuvent être distingués selon plusieurs critères :
- La hauteur, qui détermine l’accessibilité des feuillages et l’emprise sur l’herbe ;
- La persistance du feuillage (caduque, persistant), qui modifie les saisons de présence des feuilles et donc la mise en lumière et la protection de la strate basse ;
- L’appétence des feuilles mais aussi des tiges ;
- La toxicité, liée à la présence de composés qui impactent le métabolisme de l’animal (tanins, alcaloïdes, etc.) ;
- La capacité de repousse après prélèvement, qui est bonne pour les espèces à croissance continue comme la ronce mais plus faible pour les espèces printanières.
- Le développement de défenses vis-à-vis du pâturage (épines, poils, toxines, lignine) et des actions mécaniques, chimiques ou du feu.
A la différence de l’herbe, la croissance des ligneux est plus tardive au printemps et est continue pendant une bonne partie de l’été. De plus, ils ont un bon report sur pied estival et également un excellent report sur pied hivernal pour les ligneux à feuilles ou aiguilles persistantes.
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Des effets indirects
Les ligneux structurent le milieu et modifient le fonctionnement de l’herbe : "sous les arbres ça démarre plus tôt, ça mûrit plus tard, ça pousse un peu moins dense, ça repousse en fin d´été”.
Utiliser les ligneux dans l'alimentation du troupeau
La valeur d´usage des végétations comprenant des ligneux dépend à la fois de leur rôle dans le système fourrager et des pratiques mises en place pour orienter le prélèvement des animaux.
Pratiques de valorisation
- Pâturage direct des parties comestibles : bourgeons, fleurs, feuilles, fruits, jeunes rameaux et tiges plus âgées plus ou moins lignifiés
- Pâturage direct des feuilles et fruits au sol
- Étêtage / Émondage : les branches d’arbres sont coupées en fin d’été ou en automne et données à pâturer en vert, ou bien stockées en sec pour une distribution plusieurs mois plus tard.
Les fonctions saisonnières
Bien qu’ils soient aussi appréciés des troupeaux au printemps, les ligneux offrent un fourrage recherché en été car complémentaire à l’herbe (les animaux cherchent les feuilles des ligneux moins fibreuses que l’herbe sèche à cette saison) ou en hiver (les animaux profitent des feuillages persistants, ou des fruits tombés au sol).
Les types de besoins alimentaires
Certaines espèces ligneuses ont une valeur nutritive plus forte (frêne, saule, framboisier, etc.) que d’autres (chêne, noisetier, etc.). Mais, l’intérêt commun de tous les ligneux réside surtout dans les effets bénéfiques qu'ils procurent sur l'appétence globale de la végétation. Ils permettent à l’animal d’opérer une diversité de formats de bouchées, qui stimule l’ingestion et participe ainsi à atteindre des performances zootechniques satisfaisantes (y compris sur des plantes de moindre valeur nutritive).
De plus, la notion d’appétence relative au cours du temps est à considérer. Si les feuilles des buissons ne sont pas très attractives au printemps lorsque l’herbe est jeune, elles le deviennent beaucoup plus lorsque l’herbe est mûre. Dans ces conditions, les feuilles sont alors moins fibreuses que l’herbe.
La gestion des toxines par l’animal
L’exposition croissante des animaux (une à deux heures par jour pour commencer), et ce dès leur jeune âge, leur donne le temps d’activer les voies métaboliques des reins (élimination des toxines dans les urines) et du foie (modification ou destruction des toxines). Pour ce qui est des glands ou châtaignes riches en amidon, la présence d’autres ressources fibreuses et/ou azotées facilitera leur digestion. Aussi, certaines associations de plantes annulent l’effet des toxines. Ceci relève de l’apprentissage des animaux.
Renouvellement sur le long terme des ressources ligneuses
Si l’on souhaite valoriser les ligneux, il est indispensable de chercher à contrôler leur densité et/ou leur accessibilité de façon à maintenir la ressource à long terme.
Que ce soit dans l’objectif de favoriser les ligneux ou de les faire régresser, il est nécessaire de connaître les mécanismes biologiques mobilisés afin de ne pas subir une évolution non souhaitée de la couverture ligneuse par la mise en œuvre de pratiques non adaptées à ses objectifs.
Mécanismes biologiques mobilisés dans le schéma ci-dessus
- La mise en réserve énergétique (figure ci-dessous) : les réserves permettent la croissance des feuilles et des tiges, elles sont indispensables à la survie des ligneux. Elles sont situées dans les racines et dans le bois. La non reconstitution des réserves au fil des années par prélèvement inadapté et répété des feuilles et tiges (pâturage ou coupe) entraîne la nanification, voire la mortalité des ligneux.
- Les stratégies d’évitement : après pâturage, les ligneux ont tendance à s’échapper en hauteur pour ne plus subir la dent de l’animal. Après broyage, les ligneux se défendent en diminuant leur appétence (lignification rapide des tiges, fabrication accrue d’épines, amertume des feuilles, augmentation des toxines).
- Le mode de reproduction : Après pâturage, les ligneux se reproduisent le plus souvent par voie sexuée (graines, semis, plantules). Certaines conduites peuvent favoriser ou pénaliser la survie des jeunes plantules (consommation complète ou incomplète de l’herbe). Après broyage, certains ligneux activent la reproduction végétative (rejets de souche et/ou de racine.
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Sources
SCOPELA, avec la contribution des éleveurs. Fiche technique du réseau Pâtur’Ajuste : Les ressources ligneuses. Novembre 2017. Disponible sur : https://www.paturajuste.fr/parlons-technique/ressource/ressources-generiques/les-ressources-ligneuses