Le report sur pied est la capacité d’une végétation à maintenir, après sa période de croissance (végétation mûre), une valeur alimentaire correcte (rendement, valeur nutritive et appétence). C’est également une technique d’élevage pour gérer l’équilibre entre le pâturage et le fourrage stocké, qui s’applique dans tous les systèmes utilisant des végétations diversifiées.
Le report sur pied des végétations permet de :
Pâturer ou faucher tard : avec un report pouvant aller de 1 à 8 mois après l’épiaison des graminées. Si l’on accepte de considérer que les ruminants digèrent les fibres et en tirent profit pour couvrir leurs besoins, il est possible de mettre en œuvre la technique du report sur pied. "L’utilisation tardive de certaines parcelles est pratique car c’est impossible d’être en phase partout avec la pousse de l’herbe".
Sécuriser le système d’alimentation : le report sur pied permet d’avoir moins besoin de fourrage récolté et de s’adapter aux variations saisonnières de la météo. Il n’est pas rare de voir des éleveurs faucher au mois de mai pour distribuer du foin à partir de la fin juin. Or, le coût associé à cette mécanisation pour la récolte et la distribution n’est pas neutre dans la comptabilité des exploitations. Cela peut permettre d’avoir une sécurité par le pâturage en été ou en hiver selon les stocks de foin.
Créer de la ressource au pâturage en été ou en hiver : répartir la disponibilité fourragère. Les milieux hétérogènes ont un bon report sur pied, et il est possible d’alimenter des bovins à forts besoins même l’été sur ce type de végétation. Ces végétations peuvent être pâturées quand les autres surfaces ne poussent plus.
Améliorer la valeur alimentaire des pâtures et faciliter la mise à l’herbe : mélanger refus et repousses pour offrir un meilleur équilibre en fibre dans la ration et éviter de broyer ou faucher les refus. Dans les repousses, les feuilles sont abondantes et les fibres absentes, ce qui peut créer des acidoses chez les animaux.
Identifier les végétations qui ont une bonne aptitude au report sur pied
Le report sur pied est élevé dans les milieux diversifiés et hétérogènes comme les milieux humides, les sous-bois, les landes, les pelouses et les prairies riches en espèces. Il dépend de la flore et des conditions du milieu.
Processus en cause
A l’échelle de la plante
Certaines plantes conservent leur valeur nutritive même après leur floraison, leur partie aérienne reste verte avec une bonne résistance à la sécheresse. Inversement les parties aériennes des graminées les plus productives et précoces se dégradent rapidement au cours de la croissance (sénescence des feuilles et des tiges).
Les repousses sont en croissance végétative et n’ont pas d’arrêt programmé par la floraison. Elles ont donc des capacités de report plus importantes, si le climat le permet.
Le report sur pied favorise la mise en réserve des plantes et donc leur capacité de croissance.
Le déprimage ralentit ou stoppe la mise à graine et relance la croissance végétative.
Disponibilité alimentaire selon l'aptitude au report sur pied des végétations
A l’échelle de la végétation
La diversité de la flore étale la croissance globale de la végétation.
Les buissons et les arbres créent un effet parasol et des abris, maintiennent la fraicheur et offrent des feuillages ou fruits comestibles jusqu’à l’automne.
Le « pailleux » protège les repousses ou semis, tard en saison (sécheresse, vent, neige...).
En pratique
Bonne aptitude au report sur pied
Forte diversité des graminées et autres plantes
Plantes à bonne aptitude : graminées à feuilles fines ou rondes dominantes (molinie, canche, brachypode, carex, jonc, légumineuses...)
Arbustes, arbres, forte hétérogénéité du milieu (effet parasol jusqu’à l’hiver)
Milieu humide, bonne réserve hydrique
Si on frotte entre les mains une plante mûre : les feuilles sont résistantes, souples, peu coupantes ou laissent des traces vertes.
Mauvaise aptitude au report sur pied
Diversité floristique faible
Peu d’hétérogénéité du milieu
Plantes à mauvaise aptitude : graminées à feuilles larges, productives et précoces (ray gras, dactyle, flouve, houlque, vulpins...)
Pelouse précoce (brome dominant...) plus ou moins dégradée (chiendent, indicateurs d’épuisement...)
Si on frotte entre les mains une plante mûre : les feuilles sont en morceau ou en poussière, abondance de nécroses.
Les compétences du troupeau pour valoriser les végétations mûres
Les fourrages à bon report sur pied ont une bonne valeur alimentaire dès lors qu'ils sont volontairement consommés par le troupeau.
Processus en cause
La présence de buissons est favorable au report sur piedLa performance zootechnique est associée à la quantité de nutriments ingérés et non pas seulement à leur concentration dans les plantes.
Les animaux habitués à manger des fourrages fibreux parviennent à digérer les parois des végétaux (flore ruminale spécifique).
La diversité stimule l’appétit : la diversité des formats de végétation (petites et grosses bouchées) augmente la motivation alimentaire des animaux au pâturage et à l’auge (relance de l’ingestion). La quantité ingérée peut être le double de celle attendue, notamment dans les situations ou plusieurs types de végétation complémentaires se succèdent le long du cheminement des animaux.
La vitesse d’ingestion des fourrages grossiers est rapide (grosses bouchées), ce qui améliore le niveau d’ingestion global au cours des repas.
La consommation de fourrages fibreux nécessite des phases de repos et de rumination (temps de vidange du rumen). Ceci influe directement sur l’appétit.
En pratique
Observer d’abord la situation du report sur l’exploitation et les intérêts qu’il pourrait avoir. Vérifier les compétences du troupeau et favoriser l’apprentissage des animaux à consommer des fourrages fibreux (découverte dès le sevrage des jeunes, adultes compétents, etc.).
Dans les parcelles utilisées en report, éviter de favoriser les plantes réputées comme meilleures fourragères car elles sont précoces et supportent mal le report sur pied. Prévoir dans la succession des pâturages la transition alimentaire vers des végétations de plus en plus fibreuses. Veiller à ne pas démotiver les animaux en leur apportant des fourrages distribués inadaptés ; chercher au contraire à apporter des compléments qui vont stimuler l’ingestion ou la digestion des fibres.
Construire des parcs qui intègrent des végétations diversifiées et des zones de repos fonctionnels (accueil de l’ensemble du troupeau). Respecter le rythme d’activité des animaux et allonger le temps de pâturage (exemple : faire pâturer les animaux la nuit en été, car ils se reposent pendant les heures chaudes)
Les techniques de pâturage en report sur pied consistent à déconnecter les périodes de croissance des plantes des périodes de pâturage par les animaux. Il s’agit alors de laisser s’accumuler l’herbe sans la récolter ni la pâturer afin de garder la biomasse produite pour plus tard. On peut pratiquer le report sur des durées très variables, selon l’aptitude intrinsèque des espèces et les conditions du milieu, allant de quelques semaines à plus de 12 mois.
Le report sur pied : une consommation différée des végétations qui poussent au printemps et à l'automne