Sol vivant et cultures industrielles
Guillaume Chedru, Antoine Chedru
C’est en 1988 qu’Antoine Chedru s’installe sur la ferme familiale dans le pays de Caux avec son frère et son père, en associés, dans une ferme en polyculture élevage (lait), système qui, depuis, a beaucoup évolué.
Les hivers très pluvieux de 1993 et 1994, ont déclenché énormément d’érosion dans leurs parcelles de limons battants avec du travail conventionnel. Suite à cela, il y a eu une prise de conscience du problème après l’intervention de Jean-François Ouvry (AREAS) avec le constat que le travail du sol amplifie le phénomène d’érosion. Cela pousse l’équipe de la ferme à complètement réviser leur itinéraire technique et même construire leur propre matériel.
Depuis son installation Antoine, et maintenant son fils Guillaume, s’inscrivent pleinement dans une approche agroécologique dans le sens où ils travaillent à l’échelle du système et cherchent activement à travailler avec et non contre les écosystèmes naturels.
Le changement de système ne s’est cependant pas fait en un claquement de doigts, mais de façon incrémentale, jalonnée d'erreurs de parcours et d'incertitudes, porté par une dynamique d’expérimentations et des groupes de travail locaux.
Spécificités de la ferme
- Réduction du travail du sol grâce au SD (semis direct) + TCS (techniques culturales simplifiées) + Couverts végétaux et plantes compagnes.
- Betteraves au strip-till sans insecticides.
- Auto-construction.
- Développement de solutions de biocontrôle telles que les extraits fermentés d'ortie, de consoude, de macération d'ail et développement de micro-organismes efficaces (EM).
Données contextuelles
Nom de la ferme | Ferme de Longueil |
Localisation | Goderville, Seine-Maritime (76) |
SAU | 160 ha |
UTH | 1,25 (Antoine Chedru à temps plein et Guillaume à 25%) |
Cultures | Betterave, blé, lin, colza |
Labels | HVE 3 |
Groupes | Sol en Caux |
Historique du terrain
Texture du sol | Limons battants, 60 % de limons |
Taux de MO à l'installation (%) | 1,7 |
Taux de MO du dernier
test labo (année n) |
2,8 (analyse de 2023) |
PH du sol 2020 (année n) | 7 |
Portance, structure... | Pas de semelle rotative, pas de semelle de labour
Bonne portance, améliorée par les couverts végétaux |
Vers de terre au m² | 110 |
Données climatiques locales
Données locales | Données nationales | |
---|---|---|
Pluviométrie annuelle
moyenne |
"Autour de 1200 mm par an"
(en moyenne 161 mm/mois) |
155 mm/mois |
T°max moyenne | 38 | 29 |
T°min moyenne | -4,7 | 2,7 |
Premières gelées
habituellement |
"Décembre quand il y en a" | |
Type de climat | Océanique |
Source: Météo France
Etapes de transition
- 1995 : Arrêt du labour pour passer au travail du sol simplifié (TCS) avec le matériel présent dans la ferme. A partir de cette date, avec des pluviométries importantes de 1000 à 1200 mm par an, Antoine n’a plus observé d’érosion dans ses parcelles. Il explique que s’ils sont passés par la case TCS c’est parce que le sol n'était pas encore prêt pour se "débrouiller tout seul". Il y avait donc quelques passages de déchaumeur, assez profonds, pour construire une structure propice au développement de racines. Au fur et à mesure le taux de matière organique (MO) augmente et le travail diminue de profondeur (d'abord de 20 à 15 cm puis 10 cm).
- 2000: Départ du frère d'Antoine de la ferme, embauche d'un salarié pour son remplacement.
- 2010 : Ils testent les betteraves au strip-till.
- 2012 : Fin du troupeau laitier.
- Hiver 2012-2013 : Avertissement de l'agence de l'eau suite à d'importantes coulées de boue sur les routes et des problèmes de turbidité dans la zone. C'est à ce moment que la plupart des cultures sont implantées en semis direct.
- 2013 : Création de “Sol en Caux”: émergence enfin d'un groupe soudé au niveau du département (15 agriculteurs sur le secteur).
- 2015 : Début de la mise en œuvre des macérations de plantes en alternative aux fongicides et d'épandage de BRF (Bois Raméal Fragmenté).
- 2016 : Arrêt des insecticides.
- 2019 : 800mm d'eau en automne, début d'essais de fissuration car perte de cultures due au fait qu'en Seine-Maritime, les sols sont généralement constitués de limons fins avec un peu d'argile (12 % d'argile et 70 % de limons) qui se prennent en masse naturellement. Ce phénomène induit une stagnation de l'eau, malgré le fait que la ferme était déjà en SD pour le colza et le blé, et que le travail du sol était très superficiel pour les cultures de printemps (ce qui avait en partie résolu les problèmes d'hydromorphie).
Effets constatés des nouvelles pratiques
- Arrêt des coulées de boue et inondations, gestion de l'hydromorphie et davantage de microporosité dans les sols.
- Gain en fertilité des sols (la MO évolue d'1 point de pourcentage depuis les changements de pratiques) : "Je trouve que depuis qu'on travaille en système semis simplifié, voire semis direct, la portance des sols est nettement améliorée et, malgré les pluies, on arrive à faire des semis dans d'excellentes conditions du fait que le taux de matière organique soit remonté et que les sols soient en bien meilleure santé."
- Économie de charges : Aujourd'hui, la consommation la plus importante sur la ferme est la moissonneuse.
- Les pratiques de SD sont favorables au développement des limaces et des campagnols. Antoine passe donc une herse à paille après la récolte, pour mettre au soleil les œufs de limaces. Il intervient aussi avec du Sluxx (Molluscicide) en préventif, jusqu’à 15 jours avant les semis. Pour les campagnols, il compte sur les prédateurs naturels, qu’il favorise par des perchoirs dans les parcelles, ainsi que sur le travail du sol qu’il a maintenu pour certaines cultures (betterave et lin).
- Effet des essais avec les plantes compagnes / macération, cumulé à l'arrêt des insecticides sur la pression ravageurs : Un test Berlèse a été réalisé en décembre 2021 pour voir l'effet de l'arrêt des insecticides dans le colza associé à la féverole. Le résultat a été de 0,6 larves d'altise/ pied, sur une parcelle de 2,8 à 3 % de MO. Un colza qui est robuste et qui sort plus rapidement à la sortie d'hiver fait que la larve d'altise reste dans le pétiole et ne va pas faire tant de dégâts dans les tiges.
- "Depuis qu'on travaille en système semi simplifié, voire semis direct, la portance des sols est nettement améliorée et malgré les pluies, on arrive à faire des semis dans d'excellentes conditions du fait que le taux de matière organique soit remonté et que les sols soient en bien meilleure santé."
Essais
- Pucerons : La ferme de Longeuil fait partie d’un PNRI (Plan National de Recherche et Innovation), avec 150 fermes pilotes au niveau national, suivies par l’ITB (Institut Technique de la Betterave). Ils travaillent avec les sucreries pour l'arrêt des néonicotinoïdes sur la betterave.
- Les plantes compagnes : Ils ont de bons résultats avec l’orge (20kg/ha) notamment sur la virose et les pucerons, même s'il y a un impact sur le rendement de 10 t (destruction au stade montaison, 2 mois après son semis).
- Les macérations d’ail, efficaces sur les altises du colza et du lin, ont aussi été testées, mais elles ne sont pas efficaces pour la betterave car le puceron se met sous la feuille et n’est pas atteint par la macération qui est un produit de contact.
- Les champignons endophytes libérés par un couvert de fétuque inoculée, censés être répulsif des pucerons. La stratégie a été abandonnée car elle a donné très peu effet sur les pucerons ce qui a entraîné des pertes importantes de rendements.
- Les lâchers de chrysopes, connues pour être des prédateurs des pucerons, ont été testés en 2021, mais sans succès.
- Fertilisation : Guillaume et Antoine essayent différentes sources d'azote : "On aimerait bien piloter un petit peu mieux l'azote par des acides aminés.". Il y a eu un essai non concluant sur du blé mais ils continuent de chercher des pistes d'amélioration pour substituer les intrants de synthèse par des éléments naturels.
Objectifs
- "L'objectif est de continuer à faire du bon boulot. Arriver à développer de la matière organique et avoir un système auto fertile, il faut le pérenniser car ça peut changer du jour au lendemain."
- Développer d'autres cultures comme le chanvre en même temps que le lin. C'est compliqué à cause des aléas climatiques.
Suivi des cultures : rotation et itinéraires techniques
Assolement
A l'installation : blé, colza, lin fibre (il pouvait y avoir éventuellement du pois ou du maïs mais cela apportait un coût supplémentaire). Depuis, il y a eu un allongement des rotations et une diversification des cultures ce qui a le mérite d’améliorer les soucis de ray grass et de vulpin.
Les raisons ayant poussé à ce choix d'assolement allient agronomie, gestion et économie (lin culture phare de la région, féverole levier agronomique, betterave rentable économiquement).
Particularités de la rotation
Utilisation de plantes compagnes
- Féverole pour le colza (effet de leurre contre les altises).
- Orge pour le blé et la betterave.
Apport de MO extérieure
En plus des apports des couverts et résidus de paille des cultures, il y a un apport de BRF sans incorporation (cela permet de conserver l'oxygène de surface) après lin, environ 10t/ha. Cet apport prendra entre 2 et 3 ans pour être totalement décomposé (il ne faut pas retrouver du BRF dans les nappes de lin). Ils sèment ensuite directement le blé dans le BRF.
Cet apport ne se fait pas directement sentir sur la culture, mais il augmente le taux de MO stable avec des C/N à moins de 50, pour qu'il soit dégradable en humus (cf. analyses de sol Celesta lab).
Utilisation d'engrais starter
Utilisation d'engrais starter au semis pour anticiper le manque de minéralisation qu'il peut y avoir en SD.
Utilisation d'extraits fermentés
Utilisation extraits fermentés d'ortie, de consoude, de macération d'ail.
- L’ortie est une plante riche en silice qui épaissit la cuticule de la feuille du blé ou de la betterave, la rendant plus résistante aux bio agresseurs.
- L’ail un très bon répulsif contre les mauvais insectes. Le lin est une culture souvent attaquée par les altises, alors après le semis, quand le lin fait 2-3 cm, Antoine et Guillaume épandent de la macération d’ail .
Cela permet l'arrêt des insecticides sur la ferme.
Couverts végétaux
Les couverts végétaux dans la rotation sont utilisés pour plusieurs raisons :
- Apport d'azote important aux cultures qui suivent (entre 20 et 40 unités d'azote/ha par exemple pour le couvert précédent la betterave. La féverole en plante compagne du colza permet également de fixer 20 U d'azote resitué au colza en sortie d'hiver et peut même être bénéfique à la culture de blé qui suit, grâce au processus de minéralisation), générant également des économies d'engrais.
- Apport conséquent de biomasse (minimum 250 pieds à l'ha, pensé grâce à la méthode MERCI courant décembre) après un gel et un passage du Rolofaca, quand le couvert est en fleur théoriquement. Sauf que dans la région le couvert est rapidement en fleur et c'est encore trop tôt pour le détruire. Le but c'est qu'il puisse se décomposer avant la culture de printemps. Pour sa destruction normalement pas besoin d'herbicides (juste pour la culture qui suit, pour la gestion des ray grass/vulpin).
- Drainage des sols grâce à leur structure racinaire.
- Casser le cycle des graminées.
- Leur coût : Environ 70€ de l'ha.
Réduction du travail du sol sur des cultures industrielles
Même si Guillaume et Antoine sont adeptes du semis direct, ils reconnaissent que c'est un système qui a ses limites : "on sait difficilement faire sans travail du sol pour des cultures comme la pomme de terre, la betterave, le lin" notamment pour réchauffer la terre, niveler les trous de sanglier, les monticules créés par les taupes, etc.
La ligne conductrice a été de se demander comment ils pourraient faire, pendant la rotation longue, pour construire davantage le sol qu'on ne le déconstruit après une culture pénalisante comme la betterave.
Exemple d'itinéraire technique pour la betterave en réduction du travail du sol
Pour les betteraves, quelques jours avant l’implantation, ils travaillent le sol à 3 cm de profondeur avec un outil à bêches roulantes, puis ils restructurent le sol au strip-till ce qui permet de travailler qu'une ligne de 10 cm tous le 50cm d'écartement, à 12cm de profondeur.
Quelques jours plus tard, ils viennent affiner la ligne avec une fraise localisée auto construite, qui précède le semoir à betterave.
La culture du lin fibre, qui est très sensible à la compaction et nécessite un sol particulièrement bien nivelé, bénéficie également d’un travail superficiel. Sachant que ces deux cultures sont celles qui déstructurent le plus le sol, Guillaume et Antoine tentent des les éloigner d'avantage l'une de l'autre et d'allonger la rotation pour donner un temps de repos au sol.
Emploi de la fissuration
- Après la culture de betterave, suivent celles du colza et du blé où ils en profitent pour faire de la fissuration rattrapant la déstructuration opérée par la betterave.
- Il faut décompacter les sols car les couverts végétaux ne décompactent pas, ils structurent. Antoine et Guillaume emploient donc la fissuration à partir de 2019, suite à un hiver particulièrement pluvieux. Ils pensent l'arrêter dans 8 ans.
- Les agriculteurs passent une dent droite et fine à 35 cm sur toutes les parcelles après le colza et avant le blé, car ils ont ressenti une compaction à partir de 30cm dans leurs sols. L'idée étant que les racines des repousses de colza continuent de pousser dans les sillons de la fissuration.
- L'outil utilisé a été auto-construit sur le strip-till. Achat de : socs Duro + de dents droites, mises à la place des dents de strip-till qui font l'effet d'un "couteau planté dans le beure" + des disques gaufrés à l'arrière, car sinon il y a un risque de taules ondulées en faisant descendre les dents.
- Sur le marché, un fissurateur peut coûter entre 10 et 15000€. Dans leur cas, comme ils avaient déjà le châssis (qui coûte entre 6 et 7000€), l'auto-construction leur a coûté 2500€ pour l'achat de toutes les extensions, dents comprises.
- Consommation de 30L/ha dans des sols très compactés.
- Résultat : Des zones d'hydromorphie présentes en 2019 commencent à disparaître aujourd'hui.
Fissuration : Quelques précautions
- Fissuration ne signifie pas décompaction qui elle va "déplacer des horizons" et bouleverser l'organisation verticale. Les différents agrégats dans le sol doivent rester à leur place. La fissuration gère la compaction sur le long terme et peut faire gagner quelques années dans la transition (par contre, avec une dent Michel si on repasse avec une machine lourde derrière, on recompacte le sol).
- Il faut comprendre où est la compaction grâce à un profil de sol et fissurer 5 cm en dessous de ce point là. Il faut également faire attention à l'espacement des dents qui doit faire 1,5 fois la profondeur de travail.
- Il faut absolument cumuler la fissuration avec des racines car sinon, au mois de septembre avant les fortes pluies, les limons fins vont descendre dans le sillon. Les racines vont tenir les limons de surface et prolonger le sillon de la dent de fissuration plus en profondeur.
- Attention également à ne pas fissurer dans des contextes trop humides car on a tendance à lisser les parois de chaque coté de la dent mais, il faut un minimum d'humidité pour que le sillon tienne. Sur des limons fragiles, ne surtout pas fissurer pendant les mois de décembre et janvier.
Fissuration et EM
- A la ferme de Longeuil, Antoine et Guillaume ajoutent des micro-organismes efficaces (EM) à la fissuration (de la marque EM-Chiemgau pour la souche mère). Ce ne sont pas des EM purs qui sont épandus car cela coûterait trop cher, ils les multiplient dans des IBC pour 800 à 900 L de solution à la fin.
- Pour 800 L de solution : 500L d'eau chaude dans un chauffe eau, entre 30 et 34°C pour que les micro-organismes (bactéries, levures, champignons) se multiplient pendant une dizaine de jours + 1 L d'EM solution mère + 30 L de mélasse pour nourrir les micro-organismes + 3 kg de sel de Guérande, car il faut un pH assez faible. Une fois le pH à 4,5, la préparation est prête.
- Lors de l'épandage de cette préparation terminée, ils diluent 30 L d'EM multiplié + 3 L de mélasse dans de l'eau.
- L'idée est de réinjecter des micro-organismes dans le sol dans l'optique de faire travailler la vie du sol pour qu'elle ne stagne pas. Il est possible de le faire avec des ferments lactiques, Antoine et Guillaume ont préféré les EM pour la simplicité de la multiplication.
Focus biodiversité sur la ferme
Sur la ferme il y a douze ruches (appartenant au président du Conseil Départemental de la Seine-Maritime), ils veulent donc éviter la mortalité, c'est un paramètre qui a motivé la réduction de produits phytosanitaires et le zéro insecticides.
"Il faut leur donner à manger en permanence. Elles se nourrissent au printemps, au moment de la floraison des féveroles, des pois, des colzas. Les couverts végétaux à base de pois, de tournesols et de féveroles les aident à passer le cap de l’hiver".
Focus autonomie
- Cultures autonomes en semences : Blé, féverole (font de l'échange de graines aussi féveroles contre tournesol par exemple).
- Cultures aux semences achetées : Betterave, colza.
- Autonomie globale : Atelier d'auto-construction pour les machines (notamment semoirs), échange paille / fumier, séchoir et lieu de stockage sur la ferme, branches et déchets verts amenés par la déchetterie et les voisins.
Equipement : semoir à disques ET semoir à dents
La ferme est bien équipée niveau matériel, car dans un contexte de région très pluvieuse la fenêtre d'opportunité est assez courte pour semer. Guillaume et Antoine alternent notamment entre deux semoirs : un à disques et un à dents :
Le semoir à dents
Réalisé en auto-construction. L’investissement total est de 30 000€. Dans le commerce, un équipement équivalent reviendrait à 100 000€ environ.
- L’outil fait 6 m de large et comporte 20 éléments espacés de 30cm.
- 3 niveaux de profondeurs : Un seul passage peut faire 3 opérations différentes (ils ont notamment ajouté une micro fertilisation pour faire de la localisation en fertilisation dans le sillon).
- Semis : Adapté pour de grosses et petites graines (couverts végétaux, colza associé).
- L’objectif étant de perturber le moins possible le sol, l’outil roule à une vitesse maximale de 7 km/h.
- Une attention particulière est aussi portée sur la pression des pneus qui doit être basse.
- Le débit de chantier est de 4 ha/h.
- Le semoir est en porté, il fait 3,5 T et un relevage et une puissance importants sont donc nécessaires, par rapport à un semi-porté.
Avantages/inconvénients du semoir à dents selon Antoine :
- Perturbe moins la terre, ce qui entraîne donc moins de relevés d’adventice.
- Plus précis et ne présente pas de risque de bourrage dans des couverts très développés.
- Moins favorable aux limaces, en ne laissant pas de sillon qui leur servent d’autoroute.
Le semoir à disques
- Il a été acheté d’occasion pour 25 000€.
- Il est utilisé pour les semis de blé et de lin sous couvert végétal (trèfles ou légumineuses).
- Le tracteur est équipé d’un Rolofaca en frontal lesté (2,8 T pour 4,5 m de large) pour coucher le couvert.
- Les disques opèrent une ouverture de 12 mm. Ils sont positionnés à 15 cm d’espacement, ce qui est idéal pour le semis du lin, culture phare de la région.
- Pince la paille dans le fond du sillon, ce qui perturbe grandement la levée.
Système d’autoguidage RTK – confort de travail
- Le système RTK coûte 15 000€ / tracteur, pour la cartographie des parcelles. On peut ensuite l’utiliser pour tous les tracteurs.
Autres matériels
- Semoir à betterave partagé avec un voisin.
- Matériel de récolte en CUMA.
- Strip-till
Volet économique
Antoine et Guillaume sont lucides sur leur système : "Avec le labour, on aurait peut-être de meilleurs rendements. Mais c’est la marge et pas le chiffre d’affaires qu'on regarde".
Colza | Blé dur | Betterave | |
---|---|---|---|
Produit | 2 812 € | 2 915 € | 3 960 € |
Semences | 161 € | 378 € | 288 € |
Engrais | 717 € | 424 € | 382 € |
Oligos | 15 € | 36 € | 32 € |
Phytos | 67 € | 99 € | 183 € |
Mécanisation | 53 € | 50 € | 75 € |
Irrigation | 0 € | 0 € | 0 € |
Marge brute 2022 | 1 800 € | 1 927 € | 3 000 € |
Evolution des marges brutes des cultures de vente
- Les intrants ont énormément augmenté les azote, ils ont été multipliés par trois, le phosphore, la potasse et tous les produits oligoéléments et phyto.
- Le séchoir consomme beaucoup d'énergie.
- Pour le carburant: dans les documents de comptabilité il faut savoir que les prestations chez d'autres agriculteurs ont été comptabilisés, Guillaume et Antoine, ne dépassent pas les 50 et 60L/ha.
Commercialisation
Avant, Guillaume et Antoine livraient tout à des organismes stockeurs. Maintenant ils alternent entre quelques coopératives de ventes à terme et un peu de vente directe. Ils regardent constamment les évolutions des cours du marché. L'essentiel, c'est déjà de connaître son coût de production et à partir de là, "on peut définir une stratégie de vente".
Culture | Client |
---|---|
Lin | Agylin |
Betterave | Cristal Union |
Colza | Négociant |
Féverole | Couvert + négociant |
Pois | Couvert + négociant |
Maïs | Vente directe à un éleveur |
Stockage
Ils stockent 100% de leurs récoltes grâce à l'adaptation d'anciens bâtiments d'élevage présents sur la ferme avec :
- Une ventilation adaptée.
- Un stockage à plat sur des quais de niveau.
- La présence d'un séchoir pour sécher aussi les récoltes trop humides.
Bilan économique, social et environnemental
- EBE/UTH : 194 336 (e)
- EBE/CA (%): 41
- Subventions/CA (%) : 10
- Annuités/EBE (%) : 34
- Charges/CA (%) : 70
Source: Moyennes régionales Agreste/Rica (Réseau d'Information Comptable Agricole) 2021
- Niveau de confort au travail, prise en compte avec la pénibilité physique ou mentale : 8/10
- Satisfaction économique: 10/10
- Satisfaction du travail au quotidien, sensation d'être entouré dans son travail : 10/10
- Coopération avec d'autres acteurs du territoire, entraide: 7/10
- Cadre de vie : 10/10
Le temps de travail est difficile à estimer.
- Tx de MO: 2,8
- Couverture du sol (j/an) :340 jours
- Indice de travail du sol (surface travaillée x coefficient d'aggressivité x profondeur): 1,2 i(l a été calculé sur deux itinéraires techniques, celui du colza et de la betterave)
- SIE/SAU : 0,04
- Diversité des cultures (nbre de culture dans l'assolement, sans les couverts) : 6
Source: GisSol (Taux de matière organique)
Conseils pour se lancer
- Commencer par le semis simplifié et augmenter les taux de MO petit à petit: "Si vous n'avez pas une bonne porosité naturelle et un bon taux de matière organique, vous ne pourrez pas vous passer du travail du sol. Il faut commencer par créer un sol dans les premières années de transition. C'est un travail de longue haleine."
- S'entourer: Antoine s'est senti isolé dans la démarche d'expérimentation dans laquelle il s'est lancé (au départ ils étaient cinq sur le département et tous les organismes du secteur leur disaient qu'ils allaient droit dans le mur). Ils ont beaucoup été aidés par Jean-François Aubry et par les échanges sur les forums internet mais surtout par le travail en groupe. Cela a été très dur de sortir des sentiers battus, faire face au regard et à la pression exercée par d'autres agriculteurs qui ne questionnent pas leur modèle. Antoine est donc reconnaissant de faire partie d'un groupe de 15 agriculteurs un peu originaux et pour qui toute idée a le mérite d'être essayée, cela le confronte aussi à une ouverture d’esprit permanente.
- Intégrer la filière agricole à la transition : Un groupe ne peut pas non plus tout changer tout seul : Sol en Caux a donc intégré l’ensemble de la filière agricole en amont et en aval (coopératives organismes stockeurs techniciens, organismes de gestion...).
- Quand on a une approche globale et qu’on s’occupe du sol cela ouvre des horizons exceptionnels.
Vidéo
Sources
- Visite de la Ferme de Longueuil réalisée le 07/11/2023.
- Décompacter un sol en semis direct, Guillaume Chedru.
- Tour de plaine #5: Gestion d'un système grandes cultures pour réduire les charges et protéger le sol (Youtube - AgroLeague).
- Moyennes régionales Agreste/Rica (Réseau d'Information Comptable Agricole) 2021.
- GisSol.