Indicateurs des propriétés chimiques du sol
La fertilité chimique signifie que la plante trouve et absorbe l’ensemble des éléments dont elle a besoin pour pousser. Pour s’assurer que la nutrition minérale de la culture est optimale, il est important de connaître les équilibres chimiques, le pH et l’état biologique de son sol. Voici plusieurs tests permettant d’accéder à un résultat indicatif sur les propriétés chimiques d’un sol.
La chimie du sol
La chimie du sol est définie par la composition, les propriétés et les réactions chimiques des sols. Le sol chimique est en constante interaction avec le sol physique et le sol biologique. En effet, les propriétés chimiques du sol correspondent aux teneurs et aux disponibilités des éléments minéraux pour les plantes et aux paramètres chimiques du sol en lien avec leur restitution ou leur disponibilité.
On peut estimer les propriétés chimiques du sol en étudiant son pH, sa teneur en azote, en carbone et en eau.
Kit d'analyse complète du sol
La méthode
Le principe de ces kits est de mesurer les différents indicateurs chimiques d’un sol :
- La capacité d’échange cationique.
- L’état acido-basique : pH eau, pH KCl, calcaire total et actif.
- L’état organique : matières organiques, N organique, C/N, IAM.
- L’état minéral : conductivité, P2O5, K2O, MgO, Ca0.
- Les oligo-éléments : fer, cuivre, zinc, manganèse et bore.
La plupart de ces kits se composent d’une fiche de renseignement, de sachets de prélèvement, d’une fiche conseil-prélèvement et d’un carton de lettre suivie pré timbré, pour l’expédition de l’échantillon de sol. Après envoi de l’échantillon dans un laboratoire d’analyse, les résultats seront accessibles en 15 jours. Ces résultats se présentent sous la forme d’un diagramme radar de l’état de fertilité du sol. Pour certains kits, vous pouvez à ce moment là, contacter l'ingénieur responsable des interprétations pour faire un bilan avec lui des tableaux de fertilisation et des conseils donnés.
Intérêts
Les résultats de cette analyse sont un bon support pour l'élaboration d'un plan de fertilisation à long terme.
Les avantages sont :
- Sa simplicité d’utilisation : l’analyse chimique est faite en laboratoire par des professionnels.
- Son accessibilité : ils sont vendus dans les commerces ou sur le web. Cependant, d’autres kits d’analyses plus spécifiques sont disponibles en libre service et permettent de cibler un élément chimique du sol (kit d’analyse de l’azote, du pH…).
Analyse du pH
Ces tests sont très simples et permettent d’apprécier l’acidité ou l’alcalinité d’un sol, c'est à dire le pH d’un sol. On les utilise lorsque l'on veut identifier une pollution des sols ou déterminer le type de culture à planter. Ces méthodes sont simples et peu couteuses mais ne permettent pas d’obtenir des mesures précises sur le pH d’un sol mais renseignent sur la nature acide ou basique de celui-ci. On peut noter :
- Un sol calcaire est un sol alcalin.
- Les sols très riches en humus ou en sable sont probablement acides.
Détermination de l'acidité
Test au bicarbonate de soude
Observation d'une réaction chimique due au contact entre le bicarbonate de soude et le sol.
Matériel : Du bicarbonate de soude, un récipient.
Contexte : Sur terrain et peu précis.
- Mélanger un échantillon de sol avec de l'eau déminéralisée pour former une boue. Puis verser le bicarbonate de soude.
- Si la solution "pétille", alors le sol est acide.
Détermination de l'alcalinité
Test au vinaigre
Observation d'une réaction chimique due au contact entre le vinaigre blanc et le sol.
Matériel : Du vinaigre blanc, un récipient.
Contexte : Sur terrain et peu précis.
- Verser le vinaigre blanc sur l'échantillon de sol.
- Si le vinaigre réagit, alors le sol est alcalin.
Détermination de l'acidité ou de l'alcalinité
Méthode du chou rouge
Observation d'un changement de couleur.
Matériel : De l'eau distillée, un chou rouge, des récipients.
Contexte : Au laboratoire et peu précis.
- Emincer le chou rouge. Faire bouillir de l'eau distillée pure. Placer ensuite le chou rouge dans l'eau et laisser tremper les morceaux pendant une dizaine de minutes avant de les retirer. On conserve le jus violet qui, en toute logique, possède un pH neutre (7). Placer ensuite un peu de jus dans un récipient propre, et ajouter deux cuillères à soupe de terre. Laisser ce mélange reposer une demi-heure avant de vérifier la couleur.
- Si on le souhaite, on peut d'abord vérifier les couleurs en testant le jus avec du bicarbonate (alcalin) et du jus de citron (acide) : le premier fait virer la solution au bleu-vert et le deuxième au rose vif. Cela permet d'avoir des solutions comparables aux résultats trouvés.
- Si la solution est violette, alors la terre possède un pH neutre.
- Si la solution est rose, la terre possède un pH acide.
- Si la solution est bleue/verte, la terre possède un pH alcalin.
Méthode de détermination du pH
Mesure du pH à l'aide d'une méthode instrumentale.
Matériel : Des récipients, un pH-mètre, KCl ou CaCl2, des solutions tampons.
Contexte : Sur terrain ou en laboratoire. Le test est rapide et c'est une méthode de référence.
- Laisser sécher une quantité définie de sol à température ambiante durant au moins 12 heures. Confectionner une suspension du sol (contenant au moins 5g de sol) dans cinq fois son volume, soit d'une solution de chlorure de potassium (KCl) 1M de qualité pour analyse, soit d'une solution de chlorure de calcium (CaCl2) 0,01 M de qualité pour analyse. Agiter énergiquement la suspension durant cinq minutes. Laisser reposer la suspension durant au moins deux heures, mais pas plus de 24 heures. Mesurer le pH de la phase liquide à l'aide d'un pH-mètre, étalonner avant chaque mesure avec une série appropriée de solutions tampons (pH 4 et pH 7 par exemple).
- Si la solution présente un pH compris entre 0 et 6, alors c'est acide.
- Si la solution présente un pH de 7, alors c'est neutre.
- Si la solution présente un pH compris entre 8 et 14, alors c'est alcalin.
Analyse optique du sol
La composition chimique des échantillons de sol grâce à leurs propriétés d'absorption et de réflectance de la lumière peut être étudiée à partir de deux tests :
- La Spectroscopie Proche InfraRouge (SPIR ou NIRS) qui mesure et analyse des spectres de réflexion dans la gamme de longueurs d'onde 780 à 2500 nm. Cette technique est utilisée principalement pour la détection des atomes de carbone, d'oxygène, de soufre, d'azote et d'hydrogène.
- La Spectroscopie Moyen InfraRouge (SMIR ou MIRS) qui mesure et analyse des spectres de réflexion dans la gamme de longueurs d'onde 2500 à 25000 nm.
On les utilise pour, analyser la teneur en eau des semences, analyser la qualité des fourrages, du soja et du blé.
Le matériel
Il est nécessaire d'avoir une source lumineuse, un monochromateur, un filtre proche infrarouge, une cuvette, un détecteur, un ordinateur.
La technique
Pour chaque analyse, une phase d'étalonnage est nécessaire. La SPIR et la SMIR consistent à soumettre un échantillon à un rayonnement situé dans le domaine du proche IR, l'échantillon est ainsi scanné.
Pour chaque longueur d'onde, la part du rayonnement réfléchi (réflectance) par l'échantillon est mesurée à l'aide de détecteurs et convertie en absorbance. L'ensemble de ces absorbances constituent le spectre qui peut être considéré comme une empreinte globale, reflétant la composition chimique de l'objet analysé. Résultats :
Résultats :
- Les spectres PIR apportent des informations provenant principalement des composés organiques et des argiles.
- En moyen IR, l'absorption est intense et les bandes obtenues sont nettes et assignables à des groupes chimiques. Les pics sont principalement dus aux variations des liaisons CC (carbone-carbone), CN (carbone-azote) et CO (carbone-oxygène). Les spectres MIR contiennent des informations à la fois sur la matière organique et sur les minéraux.
Avantages
- Méthode rapide (spectre obtenu en quelques secondes).
- Méthode facile à mettre en œuvre et non destructive (pas d'altération de l'échantillon).
- Le coût d'une analyse est faible.
Inconvénients
- Le niveau d'analyse nécessaire est expert.
- La SPIR ne permet pas la détection de constituants présents à l'état de traces. La mesure de la matière minérale n'est en principe pas possible en SPIR car les éléments minéraux n'ont généralement pas de liaisons dans ce domaine spectral. L'eau possède une forte capacité d'absorption, ce qui peut être un inconvénient pour les échantillons frais (humides) car son signal peut masquer celui des autres constituants de l'échantillon.
Analyse de la teneur en Carbone
Ces tests permettent de déterminer la quantité de matière organique, le taux de carbone organique, le taux de carbone total d'un sol. Avec ces données, on peut rendre compte de l'impact de différentes pratiques agricoles sur la qualité des sols.
Test au permanganate de potassium
Observation de la capacité d'oxydation de la matière organique quantifiant le compartiment labile du carbone du sol, c’est-à-dire la matière organique fraîche, facilement dégradée par la pédofaune. Ce test permet de rendre compte de la proportion de matière organique dans un échantillon de sol.
Matériel : Une fiole de permanganate de potassium, une pipette, une fiole vide, une échelle de couleurs pour le diagnostic.
- Faire sécher un échantillon de sol au soleil sur une bâche noire par exemple. Mettre un échantillon de sol dans une fiole préalablement remplie avec une solution de permanganate diluée. Attendre 10 minutes avant d'interpréter le résultat qui se manifeste par un changement de couleur.
- Si la solution présente au-dessus de l'échantillon de sol (déposé au fond de la fiole) reste rouge à violette, alors le sol contient très peu de matière organique. Si la solution devient plus claire, alors le sol possède une richesse importante en matière organique.
Méthode Dumas ou méthode de combustion sèche
Mesure de la quantité de gaz carbonique formée au cours de la manipulation.
Matériel : Une balance analytique, de la verrerie courante de laboratoire, un tamis de maille 250 µm, un appareil de dosage du carbone total, des creusets, des réactifs (substance étalon, eau déminéralisée, acide chlorhydrique).
- L'échantillon est chauffé à une température d'au moins 900°C dans un flux de gaz contenant de l'O2, et exempt de gaz carbonique. Le carbone présent dans l'échantillon est alors oxydé et désorbé sous forme de CO2. La quantité de CO2 dégagée est mesurée par titrimétrie, gravimétrie, conductimétrie, chromatographie en phase gazeuse ou grâce à une méthode de détection dans l'infrarouge. A 900°C, les carbonates sont entièrement décomposés. Le dosage du carbone organique consiste à éliminer préalablement les carbonates en traitant l'échantillon à l'HCl ou en soustrayant la teneur de carbonates du carbone total.
- On obtient alors la teneur en carbone total et la teneur en carbone organique. Attention à étalonner l'appareil.
Calcimétrie
Mesure du carbone minéral contenu dans l'échantillon principalement sous forme de carbonate de calcium ou de magnésium.
Matériel : Une balance analytique, de la verrerie courante de laboratoire, un calcimètre, des réactifs.
- Un échantillon de sol est placé en milieu acide afin de décomposer les carbonates et dégager le carbone minéral sous forme de CO2.
- Le volume de CO2 ainsi dégagé est mesuré à l'aide d'un calcimètre ou de l'appareil Scheibler et on peut ainsi calculer la teneur en carbonates de l'échantillon. Attention à étalonner l'appareil.
Méthode Walkley-Black
Mesure de l'oxydation de la matière organique par une quantité en excès de bichromate de potassium en milieu sulfurique.
Matériel : Une solution de bichromate, une solution d'acide sulfurique, un agitateur, des tubes à essais, une centrifugeuse, un
spectrocolorimètre, du glucose.
- Même mode opératoire que la méthode Anne (ci-après) à part qu'il ne faut pas chauffer les échantillons.
Méthode Anne ou méthode par voie humide
Mesure de l'oxydation de la matière organique par une quantité en excès de bichromate de potassium en milieu sulfurique.
Matériel : Une solution de bichromate, une solution d'acide sulfurique, un agitateur, des tubes à essais, un bloc chauffant, une centrifugeuse, un spectrocolorimètre, du glucose.
- Introduire la prise d'essai dans un tube (le carbone organique présent dans l'échantillon de sol). Au moyen des distributeurs, ajouter respectivement 5 mL de solution de bichromate puis 7,5 mL d'acide sulfurique. Homogénéiser soigneusement avec l'agitateur. Placer les tubes dans le bloc chauffant à 135°C et laisser réagir 30 min. Retirer les tubes et ajouter 50mL d'eau. Refroidir dans un bain d'eau et ajuster à 75 mL avec de l'eau. Homogénéiser et laisser décanter 1h. Centrifuger une partie du surnageant à 2000 tr pendant 10 min. Etalonner le spectrocolorimètre avec du glucose. Régler le spectrocolorimètre sur une longueur d'onde de 585 nm. Passer la gamme d'étalonnage, puis les essais.
- Déterminer la fonction d'étalonnage et calculer les concentrations en carbone de chaque essai.
- Le chrome VI (orange) est réduit par la matière organique en chrome III (vert). Puis, le chrome III formé est dosé par colorimètre. En effet, la quantité de chrome III est proportionnelle à la teneur en carbone organique présente dans le sol.
Méthode | ||
---|---|---|
Permanganate
de potassium |
Peu coûteux.
Rapide. Sur terrain. Facile. |
Peu précis :
expertise visuelle de la couleur. Un spectrophotomètre portable peut réduire cette limite mais c'est plus onéreux. |
Méthode
Dumas |
Rapide.
Beaucoup d'analyse en une journée. Pas de pollution. Méthode automatisée. Résultats archivés. |
Mal adaptée aux
sols fortement carbonatés et pauvres en matière organique. Coûteux (matériel + réactifs). Laboratoire. Niveau expert. |
Calcimétrie | Peu coûteux
(matériel + réactifs). Facile et rapide. Beaucoup d'analyse en une journée. |
Nécessite
beaucoup d'expériences. Laboratoire. Niveau expert. |
Méthode
Anne |
S'adapte à
quasiment tous les types de sols. Peu coûteux (matériel + réactifs). Beaucoup d'analyse en une journée. |
Risque de
brûlures et de réactions allergiques (par les manipulations d'acide sulfurique concentré et de bichromate de potassium). Laboratoire. Niveau expert. |
Analyse de la teneur en azote
Le kit Nitrachek permet de déterminer sur le terrain, le taux de nitrate d'un sol par la mesure de la teneur en azote disponible dans le sol (sous forme d'azote nitrique). Ce qui permet ensuite de gérer au plus juste les apports d'azote de la culture en cours.
Le matériel
Il faut un kit d'analyse (lecteur, 100 bandelettes, 100 filtres, solution étalon et une tarière) à 380 €.
La technique
Avant toute mesure, il faut extraire l'azote dans une solution extractante (comme de l'eau distillée). Puis procéder à la mesure avec le Nitrachek. Il faut respecter un protocole commun sur toute l'AAC (Aire d'Alimentation de Captage), travailler en mode relatif plutôt qu'en valeur absolue, ne pas oublier que les valeurs obtenues sont différentes d'un résultat de laboratoire, ne pas hésiter à faire des répétitions.
Avantages
- C'est une méthode simple pouvant être répétée.
- Il n'y a pas de niveau d'expertise nécessaire.
Une vision encore partielle
Pour déterminer la qualité globale d’un sol, l’analyse d’un seul indicateur n’est pas pertinente. En effet, le sol est un milieu très complexe et en constante interaction avec l’écosystème environnant. Il est donc parfaitement logique de raisonner à plus grande échelle en se penchant sur plusieurs indicateurs à la fois, aussi bien des indicateurs sur la biologie des sols, sur les propriétés physiques et sur les propriétés chimiques.
Une analyse du sol peut aussi être réalisée par des experts. Il existe, par exemple, une méthodologie développée par les chercheurs de l’IRD et du Cirad pour évaluer la santé des sols en étudiant leur activité biologique : Biofunctool®. Cette méthode repose sur une évaluation multi-critères des trois fonctions essentielles à la vie du sol et des organismes qui le compose : la dynamique du carbone, le cycle des nutriments et le maintien de la structure du sol.
Cette analyse peut-être réalisée soit par les experts du Cirad et de l’IRD (dans le cadre de prestations ou dans le cadre de projet de recherche et développement), soit par des experts agronomes qui ont reçu la formation (2023).
Sources
INRAE, SOLAE, Mégane PEREZ (2021), Contribution à l’appropriation et à la généralisation de l’utilisation d’indicateurs d’évaluation de la qualité des sols en Provence –Alpes – Côte d’Azur, rd-agri, https://opera-connaissances.chambres-agriculture.fr/doc_num.php?explnum_id=163817
Annexes