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Mas de la Victoire

De Triple Performance
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Arboriculture agroécologique
Sébastien Blayac
Institut Agro Montpellier Hérault (département) Arboriculture

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Sébastien Blayac, agriculteur de 47 ans, cultive des oliviers et grenadiers en agriculture biologique depuis 2016 à Saint Pons de Mauchiens dans l’Hérault. Fortement impliqué dans la transition agroécologique, passionné par la nature et conscient des problématiques environnementales, il expérimente et se forme constamment pour améliorer ses pratiques, partager son expérience, protéger la biodiversité et la qualité de son sol.

Exploitation du Mas de la Victoire, crédit photo: ©Lucas Santucci CEN Occitanie

Contexte

  • Climat : méditerranéen avec été chaud et sec et hiver doux et humide.
  • Sol : limono-argileux, faible épaisseur moyenne (50cm), typique des terrains calcaires (ph=8.5) de garrigues et très caillouteux, excès de cuivre (37.5mg/kg) dû au précédent vigne, riche en matière organique avec un taux supérieur à 3%.
  • SAU : 15 ha
  • Productions : 5ha d’oliveraie pour la bouche et l’huile, 0.5ha de grenadier, 1.5ha de lavande et 1500 pieds d’origan.
  • Cheptel : 5 moutons utilisés uniquement pour un essai d’entretien des parcelles.
  • Label: AB depuis 2016
  • UTH : 1 personne

Sébastien fait partie depuis 2023 du GIEE “Des vignes et des oliviers pour demain”, dont l’objectif est de tester des pratiques agroécologiques. Il participe également aux ateliers de Thau depuis 2024, qui visent à former et sensibiliser les agriculteurs à l’agroécologie. Actif dans le partage de ses connaissances, Sébastien accueille régulièrement des groupes d’étudiants, d’agriculteurs et de chercheurs, notamment dans le cadre de son partenariat avec le Conservatoire des Espaces Naturels d'Occitanie.

Enjeux locaux

La commune de Saint-Pons-de-Mauchiens fait partie des cinq communes du site Natura 2000 « Plaine de Villeveyrac-Montagnac » pour lequel a été élaborée une charte visant l’adoption de bonnes pratiques en faveur du Faucon crécerellette. Cette espèce rare et menacée niche dans le vieux bâti des villages du site Natura 2000, notamment sous les toitures. Le Syndicat mixte du bassin de Thau porte l’animation du programme et met en œuvre des actions. Ce site a été désigné en 2006 car il abrite une biodiversité remarquable, notamment quatorze espèces d’oiseaux menacées et protégées à l’échelle européenne, dont le Faucon crécerellette.

De plus, le Projet Agroenvironnemental et Climatique (PAEC) « Plaine de Villeveyrac- Montagnac » validé par la DRAAF Occitanie fin 2022, couvre tout le site Natura 2000 « Plaine de Villeveyrac- Montagnac ». Le PAEC se base sur le volontariat et vise à accompagner techniquement et financièrement les agriculteurs souhaitant s’engager pour la préservation de la biodiversité et de la qualité de l’eau.

Motivations et objectifs

Sébastien a grandi sur le site de sa ferme, dans la maison familiale de ses parents. Il est particulièrement attaché à cet environnement et à son terroir, ce qui lui a permis de développer un fort intérêt pour l’écologie et l’agroécologie. Depuis son installation, il est déterminé à gérer ses vergers d’oliviers et de grenadiers de la manière la plus raisonnée possible, tant en termes de gestion phytosanitaire que d’irrigation. Il a toujours veillé à maintenir ses parcelles enherbées et, aujourd'hui encore, il cherche constamment des solutions pour les gérer de manière optimale.

Étapes de transition

  • Sébastien est fils et petit-fils d’agriculteurs. Il fait des études de droit et d'économie avant de devenir professeur des écoles. Pendant ses études, Sébastien se sensibilise déjà aux enjeux environnementaux à travers un BTSA Gestion et Protection de la Nature qu’il effectue par correspondance. En tant qu’étudiant, il avait rédigé un mémoire sur l'éveil à la conscience écologique, convaincu que le changement ne viendrait que d'une prise de conscience des jeunes générations selon un processus Émotion - Compréhension - Responsabilisation.
  • 2014 : Il passe à mi-temps afin de consacrer plus de temps à son projet d’installation et se renseigne sur l’agroécologie via des vidéos Youtube, lectures, rencontres et conférences.
  • 2016 : Il devient agriculteur en reprenant des parcelles en friche et de vieilles oliveraies appartenant à sa famille. Il est accompagné dans son installation et l'élaboration de son projet par l'association "Terres Vivantes" basée dans l'Hérault. Aujourd'hui encore, l'association lui assure un suivi économique pour son activité. Il adopte directement des pratiques issues de l’agriculture biologique et son souhait est d’avoir une ferme diversifiée. Il commence à planter des grenadiers dès son installation et débute les récoltes des oliviers déjà plantés.
  • 2017 : Il passe un diplôme d’oléologie à Montpellier pour se former sur la culture de l’olive. En parallèle, il monte un projet de plantes fraîches et aromatiques. Ses premiers essais n’ont pas été concluants. Il s’est alors concentré sur la culture des oliviers, des grenadiers et des plantes aromatiques de garrigue (lavande, thym, hélichryse). Il double sa surface d’oliviers en plantant sur ses terres 2.5ha supplémentaires.
  • 2018 : Il débute la plantation de lavande, thym et immortelle d’Italie.
  • 2020 : Premières récoltes des grenades et des plantes pour les huiles essentielles. Il commence la distillation en huiles essentielles. Il obtient le label Des terres et des Ailes de la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO).
  • 2021 : Il réalise sa deuxième récolte et distillation des huiles essentielles, mais en raison du manque de débouchés, il décide d'arrêter la production du thym et d’hélichryse. Par la suite, après avoir suivi une formation sur la LiFoFer auprès de Rémi Thinard (consultant en agroécologie et agriculture de conservation à Vers de Terre Production), il choisit de réduire les traitements au cuivre sur ses oliviers. En effet, il constate, à travers les analyses de sol, un taux de cuivre déjà élevé et préfère ne pas l'augmenter.
  • 2023 : Il entre dans le GIEE des Vignes et des Oliviers pour demain avec des projets d’installation de couverts végétaux.
  • 2024 : Il commence à récolter les fruits des oliviers plantés en 2017. Il intègre les ateliers du Réseau Agroécologique de Thau qui visent à initier la transition agroécologique sur le territoire. Il participe également au séminaire européen “Agriculture et biodiversité” du projet Programme Life et Biodiv’Paysanne du Conservatoire d’espaces naturels (CEN) d’Occitanie.

Descriptif du système actuel

Oléiculture

  • Surface : 5 ha
  • Variétés : La Picholine reste la variété principale, particulièrement dans les vergers en place. Sébastien a également planté des variétés du bassin régional telles que la Lucques (pour l’olive de table), l'Olivière, la Clermontaise, l'Aglandau et la Verdale. Cailletier est implantée en moindre proportion. L’objectif est de diversifier la palette aromatique et d’étaler la floraison dans le temps, ce qui permet de réduire les risques liés à l’alternance. Il privilégie les variétés locales qui semblent adaptées aux conditions du milieu. Avec le recul, il se rend compte que certaines variétés sont plus sensibles à certaines maladies. Dans 10 ans, il pourrait envisager de planter des variétés différentes, comme des variétés marocaines, par exemple.
  • Densité : Les espacements sont de 6x5 m à 8x8 , mais il est en général recommandé une distance minimum de 7*7 m, il doit donc tailler fortement pour compenser cette haute densité.
  • Taille : Chaque année, il essaye d’effectuer la taille avant mars. Il a eu des problèmes à l’épaule à cause de la taille manuelle, mais utilise désormais une élagueuse et un sécateur électriques pour une meilleure efficacité, avec l'objectif de passer moins de 15 minutes par arbre. Il met ensuite les résidus de tailles en andin sur l’inter rang pour les broyer.
  • Travail du sol et gestion de l’enherbement : Sébastien travaille le moins possible le sol et laisse un enherbement spontané qui offre une diversité végétale importante (plus de 30 espèces). En sortie d’hiver il effectue un travail de sol superficiel au rotavator de part et d’autre du rang au niveau de la frondaison des arbres. C’est également à ce niveau qu’il incorpore son engrais organique (Vigor 7-3-10 SK, 4 à 5kg par arbre) pour la fertilisation. Ensuite, il effectue deux passages de gyrobroyeur, un au milieu et un autre à la fin du printemps lorsque l’herbe a atteint son plein développement. Cela lui permet de limiter les passages et de favoriser un apport conséquent de biomasse qui crée un épais paillage. La gestion de l’enherbement sur le rang est assez compliquée car les oliviers sont larges, et il est difficile de passer dessous sans les abîmer. Sébastien est donc encore en recherche d’une solution. Il prévoit également d’acheter une moto bineuse déportée automotrice pour remplacer le travail du rotavator au tracteur et ainsi limiter la compaction du sol. Enfin, il a déjà testé le pâturage en 2023 sous les oliviers, mais les 5 moutons s’attaquaient parfois aux écorces.
Enherbement spontané diversifié dans les parcelles d’oliviers, crédit photo: ©Lucas Santucci CEN Occitanie
Test de pâturage ovins dans les parcelles d’oliviers, crédit photo: ©Lucas Santucci CEN Occitanie
  • Irrigation : Il irrigue par goutte à goutte, bien qu’il aimerait pouvoir se passer de cette irrigation pour limiter sa dépendance et rendre moins difficile la gestion du couvert. Cependant, sans elle il aurait perdu une grande partie de sa récolte en 2022-2023, deux années particulièrement touchées par la sécheresse.

Actuellement, il attend de voir des signes de stress hydrique sur les arbres pour irriguer. Il arrose longtemps pour humidifier le sol en profondeur et forcer les arbres à s’enraciner profondément. Il envisage d’améliorer le paillage et la gestion de l’herbe pour augmenter la matière organique du sol et réduire sa dépendance à l’irrigation.

  • Fertilisation : Il utilise des engrais organiques avec des doses faibles en azote et potasse (anciennement un mélange 5-2-2). Cette année, il prévoit d’utiliser un engrais organique vigor 7-3-10 SK, idéal pour ces oliviers qui présentaient des carences en potasse. Il applique environ 4-5 kg par arbre qu’il épand à la main. Il a pu effectuer des analyses de sol et de feuillage pour préciser au mieux ses interventions.
  • Récolte : Elle se déroule entre septembre pour les olives de table et novembre pour les olives à huile. Elle est réalisée manuellement au peigne électrique. Les olives de bouches sont ensuite soigneusement triées une par une à la main pour assurer un produit fini de qualité.
  • Gestion des maladies fongiques :
    • Cercosporiose : Certaines variétés comme la picholine sont très sensibles à la cercosporiose (champignon sur le feuillage). C’est une maladie de plus en plus fréquente au fil des ans.  Les traitements classiques pour les maladies fongiques sont à base de cuivre, mais Sébastien préfère limiter son utilisation car ses sols présentent déjà des excès. Il utilise donc le minimum de cuivre possible. Son alternative est l’utilisation de LiFoFer (litière forestière fermentée) dont le but est de booster le système immunitaire des arbres. Il fabrique ainsi de la LiFoFer et l’applique sur le sol (avant la pluie) ou sur les feuilles des arbres (après la pluie). Cependant, en raison du manque de pluie, Sébastien ne maîtrise pas bien son utilisation. Il souhaite donc poursuivre son expérimentation et espère de meilleurs résultats dans les années à venir. Une autre solution mise en place est l’usage de curatio (soufre de chaux), une alternative au cuivre.
    • Dalmaticose : La Dalmaticose est un champignon qui se développe sur les piqûres de la mouche de l’olivier. Le problème s’est intensifié depuis 2018-2019, et il constate une propagation généralisée. Sébastien effectue alors 3 traitements à l’argile au cours de l’année pour se prémunir des piqûres de la mouche.

Sébastien se rend compte que la densité importante des arbres, l’enherbement, la topographie des parcelles qui favorise une humidité permanente, et les carences en potasse et en azote favorisent les maladies fongiques et un moindre renouvellement du feuillage. Il essaie donc de réguler au mieux ces différents leviers pour limiter l'impact de ces maladies.

  • Gestion des ravageurs : Sébastien rencontre des problèmes de mouches de l’olive, qui piquent les fruits et les rendent non-commercialisables. Pour cela, il utilise des pièges en bordure de parcelle, applique de l’argile et réalise des pulvérisation très localisées de Synéis (Spinosad) lors des attaques de mouches. En cas d’attaques sur les fruits, Sébastien trie à la main tous les fruits pour ne garder que les bons.
Piège pour les mouches de l’olivier

Grenadiers

Sébastien note un manque de retours d'expérience et de ressources techniques concernant la gestion des grenadiers et continue de rechercher des solutions pour améliorer cette production.

  • Surface : 5000 m² productifs.
  • Variétés : Wonderful et Provence (pour le jus), variété israélienne Acco (pour le jus et les grenades de bouche), variété grecque Hermione.
  • Densité : Au départ, les grenadiers étaient plantés en 5x5 m, puis, sur des conseils reçus, il a ajouté un arbre sur le rang pour passer en 5x2,5 m deux ans après. Cependant, lorsque les arbres se seront bien développés, il se garde le droit d’en arracher ½ pour repasser en 5x5 m. Sur ses dernières plantations, il a finalement décidé d’opter pour un espacement de 5x4 m.
  • Taille : Il effectue une taille en juin qui maintient une structure aérée des arbres sans favoriser la production de bois l’année suivante. Les branches sont ensuite mises de côté et broyées à l’aide d’un broyeur à végétaux.
  • Récolte : Entre le 10 et le 25 octobre.
  • Irrigation : L’irrigation est nécessaire en été, surtout lors de fortes chaleurs, car sans cela les fruits éclatent à l’automne. Il a perdu un tiers de sa récolte en raison de ce problème. Dès l’apparition des fruits, il veille alors à maintenir un environnement confortable pour les arbres par une irrigation régulière.
  • Fertilisation et gestion de l’herbe : Il applique les mêmes pratiques que sur ses oliviers.
  • Gestion des maladies : Le champignon botrytis se développe sur les fruits au moment de la récolte, ce qui peut les faire pourrir. Il vérifie alors chaque fruit et jette ceux qui présentent des tâches de pourriture. On lui conseille de traiter au cuivre pendant la floraison, mais il préfère ne pas le faire et tester la Lifofer. Bien que l'impact ne soit pas catastrophique, le botrytis s'est bien développé ces dernières années.
  • Gestion des ravageurs : La zeuzère qui creuse des galeries dans le bois cause des dégâts relativement limités donc il ne ressent pas le besoin d’intervenir. On lui recommande de traiter avec Bacillus Thurigiensis (Bt) en juin, mais il hésite à utiliser ce produit, étant donné la critique qui en est faite par les scientifiques, notamment sur le manque d’informations sur la toxicité chronique via l’ingestion de produits traités au Bt, avec des impacts potentiels sur l’intestin. De plus, il y a beaucoup de nids d'oiseaux dans les grenadiers, ce qui l'incite à éviter le traitement. Lorsqu’il trouve des branches cassées, il les enlève, mais de nouvelles branches poussent constamment. Il se demande si les chauves-souris pourraient aider à réguler la population de papillons.
    Fleur et fruit de grenadiers, crédit photo: ©Lucas Santucci CEN Occitanie
    Parcelles de grenadiers au premier plan, crédit photo: ©Lucas Santucci CEN Occitanie

Lavande

  • Surface : 1,5 ha
  • Variété : Lavande Maillette, une variété officinale adaptée aux zones de plaine.
  • Irrigation : Il a effectué quelques arrosages au goutte-à-goutte les deux premières années pendant la floraison, car les plants se desséchaient avant de pouvoir fleurir.
  • Gestion de l’enherbement : Un à deux binages sur le rang en sortie d'hiver et au printemps et l’inter rang est entretenu par tonte.
  • Aucun amendement ni traitement phytosanitaire n’est appliqué.

À terme, après l’arrachage de la lavande, il prévoit de reconvertir la parcelle en prairie pour le pâturage de ses 5 moutons, avec augmentation potentielle du cheptel.

Parcelle de lavande au mois de février

Origan

Il pratique également la culture de l’origan dans une faible mesure. Il entretient ainsi un rang de 1500 pieds environ destiné à l'herboristerie.

Résultats constatés des nouvelles pratiques

  • Traitements : Il a considérablement réduit l’utilisation du cuivre, mais cela s'est accompagné d'une augmentation des maladies cryptogamiques, ce qui remet en question l’efficacité de cette stratégie. Son plan B serait la LiFoFer.
  • Enherbement : Le broyage du couvert a modifié sa diversité et sa nature, mais il reste très dense et offre une grande quantité de biomasse qui contribue à amender le sol.
  • Biodiversité : La biodiversité est très riche sur ses terres, avec la présence de papillons, insectes, oiseaux, lézards et serpent dont plusieurs espèces rares ou menacées. Il observe également que son sol est particulièrement vivant, plusieurs profils culturaux ont pu en attester.
  • Rendements :

Olives : Son objectif est de produire entre 4 et 5 tonnes par hectare. Actuellement, il obtient entre 3 et 4 tonnes par hectare, avec des rendements assez réguliers. Il préfère opter pour des rendements modérés mais stables. Avec le temps, tous les vergers arriveront à maturité et ses pratiques culturales se seront perfectionnées ce qui lui permettra d’atteindre ses objectifs.

Grenades : Il obtient des rendements très satisfaisants avec environ 25 kg de fruits par arbre.

Equipements

Sébastien a toujours privilégié l'investissement dans son propre matériel. Au début, il a parfois fait des erreurs en achetant des équipements qui ne s'avéraient finalement pas adaptés à ses besoins. Il a également hérité de l’équipement de son père, dont deux vieux tracteurs qu’il utilise régulièrement. Il a choisi de concentrer ses investissements sur du petit matériel et des équipements autoportés tels qu’un sécateur électrique, une débroussailleuse et une motobineuse. Il a également eu l’occasion de concevoir un outil de désherbage pour ses lavandes avec l’Atelier Paysan. Aujourd’hui, il bénéficie de la chance d’avoir un tracteur plus récent en prêt, fourni par son voisin.

Investissements

Matériel

Il procède à des investissements progressifs, en grande partie grâce à des aides et des accompagnements financiers. Il est notamment accompagné par le CEN pour trouver une solution technique et financière pour le désherbage de ses vergers sur le rang grâce à une enveloppe de 5000€.

Parcelles

Il dispose de 10 hectares appartenant à ses parents et environ 6 hectares provenant de sa famille proche dont il jouit dans le cadre d’un commodat (une forme de fermage).

Il n’a pas de dettes, mais il reconnaît avoir réalisé des investissements inutiles au départ, comme l’achat de plants de thym et de lavande, de matériel ainsi que de la main-d’œuvre pour la lavande, qui n'ont pas porté leurs fruits.

Transformation et commercialisation

Grenades

Elles sont transformées en jus par l'entreprise SIBIO basée à Thuir, près de Perpignan et bénéficient d’une traçabilité qui lui assure que le jus est bien issu de ses propres fruits. Tout est vendu en direct à la ferme ou en livraison.

Jus de grenade de Sébastien Blayac

Olives

  • Huile : L’huile est produite à la coopérative l'Oli d'Oc de Clermont-l’Hérault, où Sébastien fait triturer une partie de ses olives pour sa propre production, qu'il embouteille à la ferme et vend en direct. L'autre partie est destinée à la coopérative. Il commercialise également son huile par l'intermédiaire de quelques revendeurs, notamment de petites épiceries et des associations.
    Bouteilles d’huile d’olives de Sébastien Blayac
  • Olives de table : Il garde une petite quantité pour lui qu'il transforme dans l’Aude chez Oulibo. Le reste est laissé à la coopérative l'Oli d'Oc.
    Pots d’olives de Sébastien Blayac
  • Olivade et tapenade :  La fabrication est faite par Charbert Diffusion dans le Gard. Les clients en direct sont les mêmes que pour l’huile et les olives de table.
    Pot de tapenade de Sébastien Blayac

Lavande

Pendant les premières années, il parvient à vendre sa production à un distillateur de l’Aude. Toutefois, la crise actuelle du marché de la lavande a profondément impacté la rentabilité de la culture et il n'a plus trouvé de débouchés pour sa production. Aujourd'hui, il maintient la parcelle principalement pour des raisons paysagères, sans viser une production commerciale.

Origan

Toute la production est vendue en vert à un producteur d’herbes aromatiques du Pic St Loup.

Stockage

Il stocke ses produits finis voués à la vente directe à la ferme. Il souhaiterait rénover les bâtiments pour le stockage et aménager un point de vente néanmoins.

Bilan économique, social, environnemental

Bilan économique

Sébastien est accompagné financièrement par sa famille, il ne paie ni loyer ni charges. Il avait également des économies de côté lors de son installation. Aussi, il a pu bénéficier du matériel de son père. Sans ce contexte familial il n'aurait pas pu prendre le risque de quitter son métier d'enseignant, ou alors il aurait dû se tourner vers des cultures à plus forte valeur ajoutée et à une entrée en production plus rapide comme le maraîchage.

Le choix d'avoir planté de jeunes arbres a constitué un handicap au départ car il a eu beaucoup de travail et de charge pour un chiffre d'affaire quasi nul. A l'heure actuelle il ne tire pas encore de revenus suffisants de son activité, mais sa situation progresse. Pour pouvoir se rémunérer, il estime qu’il doit doubler son chiffre d’affaires (actuellement d'environ 29 000€ par an). Actuellement, il parvient à vivre décemment car il loge seul à titre gracieux dans un logement appartenant à ses parents et n’a pas de frais importants.

En termes de ratios financiers, les résultats sont plutôt positifs. Les coûts les plus élevés sont liés à la transformation, qui est effectuée par des prestataires, ainsi que les emballages.

Au début, il a fait beaucoup de dépenses inutiles et acheté des outils sans bien cerner ses besoins. Désormais, il cible les produits qu’il peut réellement vendre. En 2024 ses ventes ont augmenté de 13 % par rapport à l’année précédente.

Cette année, il a touché 3000 € grâce à la PAC et environ 4500€ en crédits d’impôts pour le bio. Le montant total des aides devrait augmenter et atteindre 9000 € l'année prochaine. Il participe également à un projet du Programme Life coordonné par le CEN et une aide de 5000 € a été proposée pour l’acquisition de matériel.

Les charges se stabilisent et ont légèrement diminué.

Bilan social

Sébastien réfléchit à diversifier ses activités afin de ménager son corps et d’éviter les tâches trop répétitives. La période de mars à l’été est particulièrement intense, lui causant des signes d’épuisement, avant d’enchaîner avec les récoltes à l’automne. En revanche, janvier et février sont les mois les plus calmes où il peut se permettre de se reposer. Bien qu’il ait déjà accueilli des stagiaires, il trouve la gestion compliquée, n’appréciant pas particulièrement d’avoir quelqu’un sous sa responsabilité. À l’avenir, avec l’entrée en production de l’ensemble de ses vergers, la charge de travail risque d’augmenter encore, nécessitant une nouvelle organisation. Travaillant en permanence sur son lieu de vie, qu’il prend plaisir à entretenir, il s’efforce d’adapter son emploi du temps en fonction de ses besoins et de son énergie.

Il aime son activité et ne pourrait pas revenir en arrière ; il aurait même souhaité s’y consacrer plus tôt. Il se sent satisfait de ce qu’il accomplit et apprécie que son travail soit valorisé, ce qui n’était pas le cas dans son emploi précédent.

Il apprécie particulièrement la diversité des tâches à accomplir, le cadre de vie privilégié qu’offre son métier et les rencontres enrichissantes qu’il fait à travers sa clientèle. Son intérêt pour l’agroécologie le pousse également à se former en continu. Il entretient de bonnes relations avec son entourage professionnel et valorise avant tout la liberté et l’autonomie que lui procure son travail.

Bilan environnemental

La ferme de Sébastien présente plusieurs atouts environnementaux liés à ses pratiques agroécologiques :

  • Préservation du sol et de la biodiversité : non travail du sol, enherbement spontané, maintien d’un sol riche en matière organique (>3%), réduction progressive des traitements au cuivre, certification Bio et Label Des terres et des ailes, présence d’un habitat riche en insectes, oiseaux et organismes du sol.
  • Gestion des ressources naturelles : utilisation de broyats végétaux pour favoriser l’infiltration et la rétention d’eau, optimisation des apports hydriques en fonction du stress des plantes.
  • Diversification et adaptation au changement climatique : diversité des cultures de vente (oliviers, grenadiers, origan) pour une résilience accrue, recherche constante d’espèces adaptées aux conditions méditerranéennes, réflexion sur l’introduction d’autres cultures (câpres, cornichon, pistachiers).

Néanmoins, la ferme présente également des limites environnementales :

  • Dépendance à l’irrigation : Bien que raisonnée, l’irrigation reste nécessaire pour éviter des pertes de rendement, notamment en période de sécheresse. De plus, les quantités d’eau apportées, même au goutte à goutte, sont à ses yeux très importantes (plusieurs dizaines de m3 par oliveraie à chaque arrosage).
  • Manque d’autonomie énergétique : dépendance aux intrants, sans production d’énergie sur la ferme.
  • Pression phytosanitaire et des ravageurs importantes

Avantages et limites des pratiques mises en place

Le bio est très exigeant sur le plan administratif, souvent plus que sur le terrain. Il bénéficie aujourd’hui d’un bon réseau de techniciens, chercheurs et agriculteurs, qui l’aide à répondre à ses interrogations.

Les principaux freins viennent du regard des autres agriculteurs. Au début, la gestion de ses cultures a été moquée et il constate que beaucoup restent figés dans leurs méthodes. Il a ressenti un manque de compagnonnage au démarrage. Il trouve également que les chambres d’agriculture sont trop axées sur la productivité, les fiches techniques et manquent d’ouverture.

En revanche, le manque de connaissances et d'expérience ont représenté un véritable obstacle pour la mise en place de certaines pratiques agroécologiques. Par le passé, cela l’a conduit à réaliser des achats inutiles.

Aujourd’hui, bien que ses itinéraires culturaux puissent être perfectionnés, il est satisfait des choix qu’il a mis en place, convaincu de leurs bénéfices pour ses terres. De plus, la diversification de sa production, qu’il prévoit d’élargir à l’avenir, constitue un atout essentiel pour renforcer la résilience économique de sa ferme.

Perspectives

Il souhaite consolider ses pratiques agroécologiques, mais se sent encore en phase d'apprentissage, peinant à prendre des décisions définitives. Au niveau commercial, il estime qu’une diversification de l’offre serait bénéfique, et qu’une mécanisation accrue soulagerait la charge physique.

Il considère que le véritable changement des pratiques agricoles au sens large doit venir des agriculteurs eux-mêmes, plutôt que des orientations politiques. Les installations récentes de jeunes agriculteurs dans son environnement proche sont pour lui un motif d'optimisme. Des inquiétudes persistent, notamment concernant la pérennité de ses arbres au regard de l’évolution du climat et de la gestion phytosanitaire. Sa ferme étant encore en phase de lancement, il reste convaincu que les agriculteurs engagés dans l’agroécologie seront ceux qui réussiront à s’adapter.

Objectifs futurs

  • Limiter l’irrigation pour limiter sa dépendance, ses coûts et favoriser sa résilience.
  • Explorer l’hydrologie régénérative dans la mise en place de nouveaux vergers.
  • Utiliser une motobineuse pour limiter son impact sur le sol et perfectionner la gestion du couvert.
  • Diversifier sa production avec des câpres, des cornichons, des pistaches et élargir sa gamme pour mieux répondre aux attentes de ses clients et augmenter son chiffre d'affaires.
  • Mieux s’équiper et mécaniser davantage pour réduire la pénibilité du travail.
  • Acquérir du nouveau matériel, rénover les bâtiments pour le stockage et aménager un point de vente, car actuellement les produits sont stockés chez lui.
  • Perfectionner ses pratiques, car tout est encore en phase de test et il souhaite stabiliser et affiner ses méthodes.

Conseils de l'agriculteur

Pour Sébastien, il est essentiel de se former et de ne pas se limiter aux conseils extérieurs. Idéalement, l’agriculteur devrait comprendre le  fonctionnement de son agrosystème, mesurer les conséquences de ses actions sur les cultures, le sol, l’environnement et apporter le plus souvent possible ses propres réponses. Apprendre de ses erreurs est souvent très formateur. Pour lui, l’agroécologie repose sur l’adaptation à un contexte particulier à un instant donné et au rythme propre à chaque individu.

La transition écologique de l’agriculture ne pourra se faire pleinement qu’avec des agriculteurs à la conscience éclairée et non par une réglementation perçue comme hostile ou inadaptée.

Si c'était à refaire?

  • Il planterait ses vergers en suivant les courbes de niveau selon les principes de l’hydrologie régénérative.
  • Il mettrait en place des systèmes plus diversifiés au sein de ses parcelles en alternant par exemple les rangs d’arbres avec d'autres espèces complémentaires.
  • Il choisirait dès le départ le matériel le plus adapté à ses pratiques.


La version initiale de cet article a été rédigée par Lise Antunès, Pauline Castel et Alioscha Lambert,


Sources et références

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