Diversification des forêts

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Nos forêts sont des écosystèmes dynamiques et précieux, offrant une multitude de bénéfices souvent sous-estimés. Face aux défis croissants du changement climatique, de l'érosion des sols et de la perte de biodiversité, la diversification des forêts s'impose non seulement comme une stratégie écologique vitale, mais aussi comme un levier économique et social fondamental pour nos territoires (MASAF, 2022). Cet article vise à éclairer ce concept, ses avantages concrets et ses enjeux.

Qu'est-ce que la diversification des forêts ?

La diversification forestière va bien au-delà de la simple présence de plusieurs espèces d'arbres. C'est une approche globale qui cherche à augmenter la variété à tous les niveaux de l'écosystème forestier:

Diversité des espèces: Il s'agit de planter et de favoriser une large gamme d'espèces d'arbres (feuillus, conifères, indigènes, adaptés aux conditions locales) plutôt que des monocultures (Leitgeb et al., 2016).

Diversité structurelle: Cela implique de créer des forêts avec des arbres d'âges et de tailles variés, différentes strates de végétation (arbres, arbustes, plantes herbacées), et la présence de bois mort (debout et au sol). Le bois mort fait partie du cycle forestier naturel et est crucial pour la conservation (WSL, 2019). Par exemple, les îlots de sénescence en Suisse, où les arbres sont laissés jusqu'à leur décomposition complète, visent à favoriser les espèces dépendantes des vieux arbres et du bois mort, avec une présence minimale de 50 m³/ha de bois mort sur pied et au sol comme critère de qualité (Canton de Vaud, n.d.).

Diversité génétique: Assurer une richesse génétique au sein des populations d'arbres est crucial pour leur capacité à s'adapter aux changements futurs, notamment la sécheresse et les maladies (Matras, 2013). La conservation et la gestion des ressources génétiques forestières sont une composante vitale de la gestion durable des forêts (Barbera et al., 2024).

Diversité fonctionnelle et paysagère: Cela concerne la variété des rôles écologiques remplis par les différentes espèces et structures, ainsi que la richesse des paysages forestiers eux-mêmes, intégrant parfois des éléments agroforestiers (MASAF, 2022).

Pourquoi diversifier ? Les bénéfices multiples pour nos territoires

La diversification des forêts procure des avantages écologiques, économiques et sociaux essentiels, particulièrement pour les travailleurs du sol :

Renforcement de la résilience face au changement climatique

Les forêts diversifiées sont plus stables et plus résistantes aux perturbations (sécheresses, ravageurs, maladies, incendies). La Stratégie Forestière Nationale italienne vise à augmenter la résilience des forêts face aux changements climatiques (MASAF, 2022). Favoriser les forêts mixtes permet aux espèces de réagir de diverses manières aux stress climatiques, augmentant ainsi leur résistance aux perturbations liées au changement climatique (González Díaz et al., 2020). La gestion forestière active, axée sur la durabilité et la résilience climatique, assure des forêts saines et stables (Österreichisches Waldbericht, 2023). L'inventaire forestier autrichien 2016/2021 confirme que la tendance vers plus de feuillus renforce la biodiversité et l'adaptation climatique (Österreichisches Waldbericht, 2023).

Amélioration des services écosystémiques

Stockage du carbone et atténuation du climat : L'intégration d'espèces complémentaires dans les forêts mixtes peut augmenter leur productivité et leur séquestration de carbone par rapport aux monocultures (González Díaz et al., 2020). Le FRL (Forest Reference Level) pour l'Italie prévoit un stockage de plus de 19 millions de tonnes de CO2 équivalent par an (MASAF, 2022). En 2022, plus de 2,85 millions d'arbres ont été plantés en Italie, générant des services écosystémiques d'une valeur de plus de 23 millions d'euros par an (Legambiente, 2023).
Protection des sols et régulation de l'eau : Les plantations forestières en Espagne ont contribué à la protection contre les processus d'érosion des sols déforestés (González Díaz et al., 2020). En Suisse, les forêts réduisent considérablement le ruissellement après les pluies, améliorant ainsi la régulation de l'eau (ISPRA, n.d.). Les systèmes agroforestiers contribuent également à la protection de l'eau potable en réduisant les pertes de nitrates et de phosphore dans les eaux souterraines (Kay et al., 2019). Le sol forestier est un milieu de vie vital pour de nombreux organismes et joue un rôle clé dans le cycle de l'eau (Walser et al., 2021).
Conservation de la biodiversité : Les zones forestières où l'on renonce à toute intervention favorisent la conservation des espèces dépendantes des vieux arbres et du bois mort (Canton de Vaud, n.d.). La conservation et le rétablissement des forêts sont des options d'adaptation et de mitigation identifiées par le GIEC (Barbera et al., 2024). Près de 40% des espèces en Suisse vivent en forêt ou en dépendent (Rapport forestier 2025, 2025). La création de réserves forestières, d'îlots de sénescence et d'arbres-habitats est une mesure clé (Canton de Vaud, n.d.; Rütler et al., 2020).

Opportunités économiques et sociales

Valorisation des produits forestiers : Il est important de valoriser le rôle multifonctionnel des forêts, y compris leur utilisation productive et leur contribution à la bioéconomie circulaire (Barbera et al., 2024). Le recyclage du bois post-consommation en Italie, par exemple, permet de produire des panneaux pour l'ameublement, évitant ainsi la consommation de bois vierge et réduisant les émissions de CO2 (Barbera et al., 2024).
Agroforesterie : L'intégration d'arbres dans les systèmes de grandes cultures offre des avantages pour la biodiversité, le stockage des nutriments, la fixation des sols, et la création de nouveaux habitats pour les pollinisateurs et auxiliaires (Kay et al., 2019).
Tourisme et loisirs : Les forêts contribuent à l'attrait public et à la valeur récréative et économique (Revitalisering Nederlandse Bossen, n.d.). L'augmentation des espaces verts urbains peut retarder l'apparition de problèmes de santé, notamment cardiovasculaires, jusqu'à cinq ans (Barbera et al., 2024).

Enjeux et pistes d'action pour les travailleurs du sol

Malgré ces avantages, la diversification des forêts fait face à plusieurs défis, mais aussi à des opportunités d'intervention directe :

Fragmentation et dégradation : L'expansion urbanistique et agricole a entraîné la déforestation et la fragmentation des habitats forestiers (Barbera et al., 2024; WWF/Adena, 2009).
Manque de gestion et de planification : En Italie, seulement 18% de la surface forestière est gérée selon des plans et le niveau de certification est faible (MASAF, 2022). Cela entrave la transition écologique (Barbera et al., 2024). Les incendies forestiers, dont la fréquence et la gravité augmentent, sont une menace majeure, souvent aggravée par une gestion fragmentée (Barbera et al., 2024; González Díaz et al., 2020; Grupo Siero, 2018).
Compaction des sols : L'utilisation d'engins lourds peut endommager la structure et la fertilité des sols forestiers, comme en témoignent les augmentations significatives de la densité apparente et les réductions de porosité après le passage de véhicules (Lüscher et al., 2015). La compaction affecte la structure des communautés microbiennes du sol (Frey et al., 2009, cité dans Lüscher et al., 2015).

Votre rôle est crucial pour inverser ces tendances et promouvoir la diversification:

Protection des sols lors des travaux forestiers : La planification systématique des layons de débardage est essentielle (Lüscher et al., 2015). Le choix des engins doit être adapté à la sensibilité du sol à la compaction, en réduisant la charge par roue et en augmentant la surface de contact via l'utilisation de pneus larges ou de semi-chenilles (Lüscher et al., 2015). Il est recommandé d'éviter les travaux sur sols humides et d'interrompre l'utilisation d'engins si des ornières de type 3 (dégâts écologiques au sol) apparaissent (Lüscher et al., 2015). L'utilisation de tapis de branches est également recommandée pour transférer les forces de traction et limiter les pointes de pression sur le sol, permettant ainsi une régénération plus rapide des sols (Lüscher et al., 2015). Des systèmes d'information comme ProFor peuvent aider à évaluer la praticabilité du sol avant les opérations (Lüscher et al., 2015).
Restauration active et agroforesterie : La restauration active, basée sur l'intervention humaine, peut accélérer la récupération des écosystèmes dégradés (González Díaz et al., 2020). La reconversion de terres agricoles improductives en systèmes agroforestiers est encouragée (Kay et al., 2019; Barbera et al., 2024).
Coopération et planification : La fragmentation des propriétés forestières privées en Suisse, où la plupart des propriétaires possèdent de petites surfaces, rend la coopération essentielle pour une gestion économique viable (Thomas et al., 2019). Les coopérations améliorent l'efficience et la rentabilité, et leur nombre a fortement augmenté en Suisse (Thomas et al., 2019). Le soutien aux initiatives de certification forestière (PEFC, FSC) et la promotion de la planification forestière obligatoire sont cruciaux pour des pratiques durables (Barbera et al., 2024; MASAF, 2022).
Participation aux politiques locales : La diversification des forêts n'est pas qu'une théorie écologique ; c'est une pratique concrète qui demande patience, détermination et une vision à long terme. En adoptant ces principes, nous contribuons collectivement à des écosystèmes plus sains, des économies rurales plus fortes et un avenir plus résilient face aux défis climatiques.

Références

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