Ricania speculum
Ricania speculum est un petit insecte piqueur-suceur originaire d’Asie du Sud-Est. Inconnu en Europe il y a encore quinze ans, il a été observé pour la première fois en Italie en 2009.[1] Depuis, il s’est installé dans plusieurs régions italiennes et a franchi la frontière pour être détecté en France, dans les Alpes-Maritimes, depuis au moins 2020.[2]
Sa progression rapide dans le sud du pays suscite l’inquiétude : cet insecte s’attaque à de nombreuses plantes cultivées ou ornementales, et pourrait à terme provoquer des pertes économiques notables.[3]
Bien qu’il ne figure pas encore sur les listes d’alerte phytosanitaire d’urgence, sa grande capacité d’adaptation et son régime alimentaire très varié en font un hôte indésirable à surveiller attentivement.[3]

Reconnaître l’insecte
Adultes[4]
- Taille : 7 à 8 mm (jusqu’à 10 mm), envergure d’ailes > 20 mm.
- Ailes antérieures brun foncé avec cinq taches claires bien visibles.[1]
- Ailes disposées en toit au repos.
- Mâle : abdomen pointu.
- Femelle : abdomen arrondi.
- Risque de confusion : Metcalfa pruinosa (plus petit, bleu sombre, pruinosité blanchâtre).

Larves (nymphes)[4]
- 5 stades, de 0,9 à 6 mm.
- Couleur : blanchâtre puis brun noir, tacheté de blanc aux derniers stades.[5]
- Fort toupet de filaments cireux à l’arrière (“aspect chevelu”).

Œufs[4]
- Pondus en automne dans les tiges ou les nervures de feuilles.[6]
- Protégés par des sécrétions cireuses formant un alignement blanc en zigzag.
- Taille : environ 0,9 mm.

Cycle et propagation
En Italie, Ricania speculum ne produit qu’une génération par an. Les œufs passent l’hiver dans l’écorce des jeunes pousses. Les larves apparaissent début mai et se développent jusqu’à début juillet. Les adultes volent de juin à octobre et commencent à pondre dès le mois de juillet, parfois jusqu’en septembre.[7]
Son introduction en Europe est probablement liée au commerce de plantes ornementales infestées au stade œuf, un stade discret et donc difficile à détecter. Une fois introduit, l’insecte peut se déplacer passivement, transporté par des véhicules ou des végétaux déplacés d’une zone à l’autre.[8]
Plantes hôtes et dégâts
Ricania speculum est très polyphage. En Italie, il a été trouvé sur plus de 60 espèces appartenant à 33 familles botaniques. Les cultures concernées incluent des fruitiers (prunier, poirier, pommier, agrumes), l’olivier, la vigne, mais aussi des plantes ornementales et sauvages comme le rosier, la ronce, l’orme, l’érable ou la clématite.[3]

Les dégâts sont liés :
- aux blessures de ponte, qui peuvent entraîner le dessèchement de jeunes pousses,
- à la consommation de sève par les larves et adultes, qui affaiblit la plante,[6]
- et à la fumagine, champignon noir qui se développe sur le miellat excrété par l’insecte, limitant la photosynthèse et ternissant l’aspect des feuilles et fruits.[9]
Le rôle de l’espèce dans la transmission de phytoplasmes n’est pas encore bien établi pour les cultures européennes, mais ce risque n’est pas à exclure.[6]
Surveillance et lutte
Aucun traitement phytosanitaire spécifique n’est actuellement homologué contre Ricania speculum. La lutte repose donc sur la vigilance et la réduction des foyers d’infestation.[8]
En automne, il est conseillé d’inspecter attentivement les jeunes rameaux à la recherche de pontes caractéristiques.[3] Au printemps, la présence de larves « chevelues » est un bon indicateur d’infestation. Les adultes peuvent être suivis grâce à des pièges chromotropiques verts, composés de panneaux qui attirent les insectes nuisibles, particulièrement efficaces et sélectifs, à installer de juillet à octobre.

Si des pontes sont détectées en automne, tailler et détruire les rameaux infestés permet de limiter la population. Des recherches sont en cours sur le contrôle biologique : en laboratoire, les larves de chrysoperle (Chrysoperla carnea) ont montré une capacité à prédater les formes juvéniles.[3]
En cas de suspicion
Si Ricania speculum est identifié sur l’exploitation, il est essentiel de prévenir rapidement les autorités compétentes : Service Régional de l’Alimentation (SRAL), Service d’Alimentation et de Santé des Végétaux (SALIM) ou Fédération Régionale de Défense contre les Organismes Nuisibles (FREDON). Un diagnostic par un expert est recommandé pour confirmer l’espèce, surtout pour les larves qui peuvent être confondues avec d’autres cicalines proches.[4]
Ainsi, Ricania speculum est un nouvel arrivant dans le paysage agricole français, encore peu répandu, mais en progression rapide. Sa capacité à s’installer sur de nombreuses plantes et à se propager discrètement impose une vigilance accrue, particulièrement dans les zones déjà touchées du sud de la France.[8][7]
Sources
- ↑ 1,0 et 1,1 Ricania speculum segnalata in Liguria: ecco di cosa si tratta, 2021, ARPAL Liguria
- ↑ Pochazia shantungensis - fiche de reconnaissance, 2023, DRAAF Nouvelle-Aquitaine
- ↑ 3,0 3,1 3,2 3,3 et 3,4 Ricania speculum, un nouvel hémiptère en Méditerranée, 2016, ResearchGate
- ↑ 4,0 4,1 4,2 et 4,3 Ricania speculum – évaluation du risque phytosanitaire, 2020, ANSES
- ↑ BSV ZNA - Ricania speculum, 2016, DRAAF PACA
- ↑ 6,0 6,1 et 6,2 Ricania speculum (Walker), the next destructive planthopper of grapevine in Europe?, 2020, IOBC-WPRS
- ↑ 7,0 et 7,1 Ricania speculum, 2025, Wikipédia
- ↑ 8,0 8,1 et 8,2 DTU-71: scheda tecnica su Ricania speculum, 2025, Protezione delle piante
- ↑ Ricania speculum Arpi, 2016, Università di Pisa