Biomasse-Energie 2050

De Triple Performance
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Ce document traite de la mobilisation stratégique de la biomasse agricole et forestière en France pour la production d’énergie à l’horizon 2050. Il vise à analyser et synthétiser les impacts environnementaux, technico-économiques et sociétaux liés à l’augmentation des prélèvements de biomasse, tout en considérant les enjeux de durabilité, les contraintes liées aux écosystèmes et les interactions avec les politiques publiques et les marchés. Son audience principale comprend les décideurs politiques, les acteurs industriels, les chercheurs, et les planificateurs publics impliqués dans la transition énergétique et la gestion durable des ressources.

Résumé

Impacts et enjeux environnementaux, technico-économiques et sociétaux associés à la mobilisation de biomasse agricole et forestière pour la production d’énergie en France à l’horizon 2050

La stratégie de mobilisation accrue de biomasse pour la production d'énergie en France doit équilibrer les enjeux environnementaux, économiques et sociaux. La diversité des usages, les politiques publiques variées, la sensibilité du système de production et la fragilité des services écologiques ont nécessité une approche multidimensionnelle. La faisabilité technique et la compatibilité sociale, ainsi que l’attractivité des stratégies, sont analysées différenciant secteur forêt et secteur agricole. La forêt, riche en biomasse, présente une croissance et un renouvellement influenceés par le changement climatique et la gestion forestière, requérant une expertise et une gestion raisonnée pour préserver ses fonctions écologiques et économiques. Le secteur agricole, face à la transition agroécologique et aux mutations des pratiques, voit ses ressources en biomasse fluctuer avec les impacts du changement climatique, les évolutions de pratiques et les tensions avec la production alimentaire. La convergence des stratégies doit limiter les conflits d’usage et respecter la priorité alimentaire tout en intégrant le développement de filières énergétiques basées sur la biomasse.

Faisabilité des prélèvements

La faisabilité des prélèvements de biomasse forestière est questionnée par la capacité technique, logistique et économique des systèmes Forestier et Industriel. Les études récentes, telles que celles de France Stratégie (2021), I4CE (2022), et autres, évaluent la capacité à atteindre des volumes de prélèvements entre 50 et 100 millions de m³ à l’horizon 2050, selon divers scénarios ambitieux ou extensifs, avec une adaptation nécessaire des filières et une politique de soutien. Les limites économiques, telles que les coûts élevés et la dispersion géographique des ressources, encadrent la réalisation de ces objectifs. La gestion forestière intense est envisageable mais doit être équilibrée pour ne pas fragiliser l’écosystème forestier, avec des seuils critiques au-delà de 60 à 80 millions de m³. La complexité relève de la capacité à mobiliser ces ressources tout en respectant la durabilité écologique.

Faisabilité dans le secteur agricole

Les prélèvements agricoles, en raison de cycles plus courts, sont plus réactifs mais aussi soumis à des contraintes de disponibilité et d’impact environnemental. La disponibilité des surfaces agricoles (28,6 millions d'hectares) et la diversification des usages (alimentation, biomatériaux, énergie, agronomie) conditionnent le développement de la biomasse énergétique. La gestion durable, la limitation de la baisse de rendement, le maintien des fonctions écologiques, la gestion des intrants, la fertilisation modérée, et la rotation de cultures sont essentielles pour équilibrer production et préservation. La réduction des surfaces dédiées à l’alimentation pourrait survenir, mais la diversification des usages et l’extension de pratiques agroécologiques peuvent augmenter la biomasse disponible. Les défis technico-économiques incluent la rentabilité, les coûts logistiques, la saisonnalité, et la nécessité d’investissements dans le stockage et la logistique.

Impacts et stratégies dans le secteur forestier

Le secteur forestier, avec une gestion à cycles longs, doit faire face à la fragilité climatique et à la complexité d’intégration des services écosystémiques, notamment la biodiversité. La demande en biomasse forestière, évaluée entre 50 et 100 millions de m³, dépend fortement des pratiques de gestion, de la régénération, et de la santé des massifs. La reconversion des pratiques, l’augmentation des prélèvements tout en maintenant la biodiversité, la gestion adaptée, et le développement des filières de transformation locales sont des leviers-clés. Les enjeux incluent la capacité à augmenter la ressource sans abîmer les écosystèmes, avec des seuils de faisabilité technique et écologique à respecter pour préserver le rôle de la forêt comme puits de carbone et espace de biodiversité.

Perspectives climatiques et dynamiques des systèmes agricoles et forestiers

Le changement climatique affecte la croissance et la mortalité forestière, avec une croissance volatile et une mortalité accrue, limitant le potentiel de stock de carbone et de biomasse à horizon 2050. La gestion forestière devra s’adapter pour atténuer ces effets, notamment par des interventions pour limiter la mortalité et favoriser la résilience. Pour l’agriculture, le stress hydrique, la variabilité climatique, et la prolifération d’agents pathogènes diminueront les rendements, mais des stratégies d’adaptation (pratiques agroécologiques, diversification, culture de légumineuses) pourront compenser ces effets. L’intensification ou le recul des surfaces cultivées dépendront des capacités d’adaptation, de la gestion des sols, et des stratégies sociétales de réduction des impacts climatiques.

Impact du commerce et des échanges internationaux

La filière forêt-bois en France souffre d’un déficit commercial de 6 milliards d’euros, accentué par une exportation de bois brut et une importation de produits transformés. La relocalisation des industries de transformation pourrait améliorer la disponibilité des co-produits pour la filière énergétique. La balance commerciale influence la capacité de mobilisation de biomasse et la maîtrise des coûts et des débouchés. La stratégie de développement doit intégrer un équilibre entre la disponibilité locale, la compétitivité économique, et la conservation des fonctions écologiques, avec une attention spéciale à l’autonomie et à la souveraineté de la filière bois et forêt.

Stratégies économiques et modèles de développement

Le développement de la filière biomasse pour l’énergie repose sur des modèles industriels et économiques intégrant des investissements, des mécanismes de soutien comme le tarif d’achat, et une gestion adaptée des ressources. Les grandes unités de production bénéficient d’un soutien structurel mais risquent d’accroître les tensions sur la ressource si elles ne prennent pas en compte la durabilité écologique. La diversification des débouchés, la valorisation locale, et la gestion équilibrée des prélèvements sont essentielles pour garantir la durabilité, la compétitivité, et la cohérence avec les objectifs climatiques et sociétaux.

Conclusion synthétique

L’augmentation du prélèvement de biomasse pour la production énergétique en France est envisageable techniquement, mais sa durabilité dépend de multiples facteurs : gestion forestière, adaptation climatique, contraintes économiques, alignement des politiques, acceptabilité sociale, et impacts environnementaux. La nécessité d’un pilotage concerté, d’une évaluation rigoureuse, et d’un cadre de bonnes pratiques est essentielle pour équilibrer développement énergétique, conservation écologique, équilibres économiques, et enjeux sociétaux. La transition devra respecter les limites écologiques, privilégier des pratiques durables, et renforcer la cohérence des filières pour atteindre une production de biomasse énergétique à horizon 2050, sans compromettre les autres fonctions essentielles des territoires.

Biomasse-Energie 2050 (fr)
Nombre de pages: 205
Pays cibles: France

Points clés

L'augmentation de la mobilisation des biomasses agricoles et forestières d'ici 2050 doit être strictement encadrée par des limites écologiques et sociales.
Le rapport souligne que, malgré la faisabilité technique, l'augmentation des prélèvements doit respecter des seuils durables pour éviter la dégradation des sols, la perte de biodiversité et la fragilisation des écosystèmes, notamment en évitant la compétition avec la production alimentaire.
Les stratégies intensives de gestion forestière pour augmenter la récolte de biomasse sont limitées par des contraintes économiques et écologiques.
Les études montrent qu’au-delà de 60 millions de m³ de prélèvements annuels, le secteur forestier atteint des limites techniques et écologiques, risquant la déstabilisation de la ressource forestière et la perte des services écosystémiques liés.
Les cultures pérennes comme le miscanthus et le switchgrass présentent un fort potentiel pour stocker du carbone et limiter les impacts environnementaux en biomasse-énergie.
Ces cultures à faible besoin en intrants et à longue durée de vie se révèlent avantageuses pour la séquestration de carbone, la réduction des émissions de GES, tout en étant moins concurrentielles avec la production alimentaire, sous réserve d’un déploiement écologique contrôlé.
La production de biomasse doit être équilibrée avec la conservation des services écosystémiques et la préservation des paysages.
Le rapport insiste sur le fait que la valorisation énergétique de la biomasse doit respecter les fonctions sociales, paysagères et biologiques des forêts et des prairies, en évitant des conflits d’usage et en privilégiant une gestion durable.
Les impacts environnementaux du retour au sol des digestats, biochars, cendres, et vinasses sont très variables et nécessitent une gestion rigoureuse.
Les émissions de N₂O, la lixiviation de nitrates, et la détérioration de la fertilité des sols sont influencées par la nature des résidus, les pratiques agricoles, et le contexte pédoclimatique, soulignant l’importance de bonnes pratiques d’épandage et de characterization préalable.
Le changement climatique pourrait réduire la production forestière en augmentant la mortalité des arbres, menaçant la contribution de la filière bois à la neutralité carbone.
Les projections indiquent une augmentation des taux de mortalité des feuillus et résineux, avec une baisse potentielle de 20 à 23 % de la production d’ici 2050 dans les scénarios les plus pessimistes, fragilisant les capacités de stockage en carbone et la filière forestière.
L’intégration des pratiques agroécologiques et la diversification des usages sont essentielles pour assurer la durabilité des filières biomasse.
Les stratégies de transition agricole vers des systèmes plus durables, incluant la réduction des intrants, la diversification des cultures, et l’utilisation de cultures intermédiaires, permettent de limiter l’impact environnemental tout en maintenant une offre de biomasse pour l’énergie.

Sources